Neila Tazi, administrateur de A3 Groupe et productrice du Festival Gnaoua et Musiques du Monde

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    Infomediaire : Neila Tazi, on vous connaît beaucoup à travers le Festival Gnaoua et Musiques du Monde, mais vous êtes surtout fondatrice de A3 Groupe et Présidente de la Commission Communication de la CGEM, éclairez nos lecteurs sur votre parcours.
     
    Neila Tazi :  J’ai créé la première agence de RP au Maroc en 1992, A3 Communication dotée d’une  importante expertise dans le domaine des relations presse, des relations publiques et de la communication globale. Puis nous avons développé nos activités dans l’événementiel à travers la création de la société Rezo Events et ce sont ces deux entreprises qui constituent aujourd’hui A3 Groupe que je dirige. Nous organisons et médiatisons des événements importants dans le domaine économique, culturel, des évènements d’entreprises, mais aussi des forums internationaux. Nous travaillons sur l’ensemble du continent et avons un large réseau à l’international.  Je suis également très engagée à la CGEM où j’ai l’honneur de présider la première Commission Communication de l’histoire de la Confédération. J’aime l’engagement, qu’il soit pour la patronat ou les Gnaoua, l’important est de faire bouger des lignes !
     
     Infomediaire : Vous êtes à l’origine d’un des meilleurs festivals au Maroc. Aujourd’hui, il a 18 ans, c’est l’âge de raison. Comment voyez-vous cette expérience musicale et humaine au bout de ces 18 ans ?
     
    Neila Tazi :  Pour mon équipe et moi même, cette expérience est avant tout un enseignement profond sur notre environnement de manière globale. Réaliser pendant tant d’années un événement dont la portée et les messages sont aussi forts nécessite un travail de terrain, d’organisation et de communication rigoureux et à différentes échelles. 18 ans c’est à la fois un long chemin et le sentiment que nous allons vers une nouvelle étape dans la vie de ce projet. Ce qui compte c’est de construire, de pérenniser, de fédérer et de convaincre de l’utilité et de l’intérêt général d’un projet. C’est en cela que l’expérience est forte sur le plan humain, car le succès repose sur la convergence d’une multitudes d’énergies, et cela demande justement beaucoup d’énergie ! Le pari était audacieux il y a 18 ans, mais avec l’ensemble des acteurs concernés, nous redéfinissons en permanence notre projet pour trouver la meilleure façon de lui donner encore plus de force, de légitimité et d’éclat.
     
     Infomediaire : Depuis toutes ces années, c’est la première fois que vous avez le financement de la ville. Est-ce une reconnaissance pour vous ou est-ce un devoir d’une ville pour laquelle vous avez tant fait ?
     
    Neila Tazi :  L’étape la plus difficile chaque année est de boucler le financement du festival et le modèle parfait n’est pas encore trouvé. Nous y travaillons avec nos différents partenaires, dans un dialogue constructif qui continuera de faire de cet événement et de cette ville un modèle et une source d’inspiration. C’est en effet la première fois que la ville accorde une subvention au festival et nous accueillons cette décision avec beaucoup d’optimisme. C’est à nos yeux une nécessité plus qu’un devoir ou une reconnaissance. Ce festival est structurant pour l’économie de la ville, la conjoncture est devenue très difficile et il nous faut tous œuvrer pour le pérenniser.
     
     Infomediaire : Le festival Gnaoua est le résultat d’un travail de longue haleine et surtout un défi de financement relevé chaque année. Pourquoi le festival peine-t-il à trouver du financement ?
     
    Neila Tazi :  Parce qu’on a tendance à placer tous les festivals dans la même case et que nous avons du mal à admettre que la culture a un coût ! Il faut aussi savoir faire la différence entre un projet d’animation et un projet culturel structurant pour l’économie d’une ville. Il y a des destinations comme Avignon, Montreux, Cannes qui se sont fait connaître grâce à un événement culturel qui fait rayonner la ville mais aussi un pays par l’art. Nous devons tous être plus conscients de la force de ce genre de projet et de leur impact  au niveau local et international.  Et puis, n’oublions pas que le festival est gratuit, nous n’avons donc aucune autre source de revenu à part les sponsors et les subventions. Nous ne pouvons pas faire autrement car c’est le festival de tous les Marocains quelque soit leur pouvoir d’achat. Et c’est là l’une des forces du Festival et l’une de ses particularité, c’est justement cette mixité sociale.
     
     
           Infomediaire : En plus de la musique, le festival a un forum qui se tient cette année sous le thème « Les femmes d’Afrique : créer et entreprendre ». Pourquoi avoir prolongé le thème « Afrique à venir » à cette édition également ?
     
     Neila Tazi :    Car à travers la culture des Gnaoua, c’est toute l’Afrique qui résonne en nous. Depuis 18 ans, nous n’avons eu de cesse de rappeler notre ancrage africain à travers cet héritage culturel qui nous vient d’Afrique subsaharienne. Nous avons créé ce rendez-vous il y a 4 ans avec le Conseil National des Droits de l’Homme et notre volonté est d’en faire un espace de débat qui apporte des éclairages sur des thématiques actuelles. L’émergence du continent africain et l’attention qui lui est porté aujourd’hui par les élites politiques et économiques doivent être accompagnés par une dynamique intellectuelle et artistique à laquelle nous essayons modestement de contribuer.