Ahmed Réda Chami, Ministre de l’Industrie, du Commerce et des Nouvelles Technologies, en charge de l’Investissement.

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    Infomediaire : Depuis votre succession à Salaheddine Mezouar en 2007, pouvez-vous nous parler de ce que vous avez réalisé et développé après votre nomination au sein du gouvernement Abbas El FASSI ?


    Ahmed Reda CHAMI : En 3 années, un nombre important de projets a été lancé et réalisé. Je citerai, en quelques lignes, les principales réalisations.
    Tout d’abord, la mise en place du « Pacte National pour l’Emergence Industrielle », véritable feuille de route pour le secteur industriel, nous l’avons doté d’un budget et d’une gouvernance reposant sur 6 domaines :

    •    Développement des Métiers Mondiaux du Maroc, à travers des offres sectorielles dédiées;
    •    Mise en place des Plateformes Industrielles Intégrées pour accueillir les investissements;
    •    Amélioration de la Compétitivité des Petites et Moyennes Entreprises;
    •    Adéquation de la Formation aux besoins de l’industrie;
    •    Amélioration du Climat des Affaires;
    •    Mise en place de  l’Agence Marocaine pour le Développement des Investissements (AMDI).


    Un bilan sur l’Etat d’avancement de ce pacte, qui en est à la 2ème année, sera présenté lors des prochaines assises de l’Industrie prévu le 5 Mai 2011.
    En octobre 2009, le Ministère a mis en place le plan « Maroc Numeric », orienté vers les nouvelles technologies, il repose sur 4 axes stratégiques :
    •    Transformation sociale;
    •    Mise en œuvre des Service publics orientés usagers; 
    •    Informatisation des PME;
    •    Développement des industries TI.


    « Maroc Numeric » décline un cadre de gouvernance qui définit les rôles et les responsabilités de chaque partie prenante, Le budget, 5, 2 milliards DH, est à la hauteur des ambitions que nous avons fixées.
    Le ministère a aussi mis en place différents chantiers pour l’enrichissement du « Plan Rawaj » :
    •    Lancement des schémas régionaux du développement du commerce et de la distribution ;
    •    Programme de modernisation du commerce de proximité ;
    •    Création des Zones d’activité commerciales.


    En juin 2009, lors du « 1er Sommet de l’Innovation », nous avons lancé la stratégie « Maroc Innovation », visant à construire un écosystème adéquat permettant l’émergence d’une économie à forte valeur ajoutée basée sur le savoir et l’innovation.
    Elle s’articule autour de chantiers bien identifiés:
    •    Le cadre légal de l’innovation ;
    •    L’infrastructure technologique et de valorisation ;
    •    Les clusters ;
    •    Le financement de l’innovation
    •    La mobilisation des talents pour l’innovation.


    Le Ministère a aussi été actif sur le plan réglementaire, puisque prés d’une dizaine de lois ont vu le jour.
    Il s’agit principalement :


    1-    Préparation et adoption de la loi sur la protection du consommateur et création du Centre Marocain du Consommateur.
    2-    Adoption de la loi relative à la protection des données personnelles.
    3-    Loi n° 51-09 modifiant la loi n° 19-94 relative aux zones franches d’exportation
    4-    Consolidation et renforcement du cadre légal régissant les activités de normalisation, de certification et d’accréditation, à travers la création du Conseil Supérieur de Normalisation, de Certification et d’Accréditation (CSNCA) ,  de l’Institut Marocain de Normalisation (IMANOR) et  du Comité Marocain d’Accréditation (COMAC).
    5-    Transformation de Poste Maroc en une SA et création de la banque postale Barid Bank
    6-    Adoption de la loi relative à l’interdiction de l’utilisation des sacs en plastique non dégradables ou non biodégradables.
    7-    Adoption de la loi relative à la création de l’agence Marocaine du développement des investissements.

    Infomédiaire : Comment s’est déroulée  l’année 2010 pour l’industrie marocaine ? Et quels sont vos objectifs pour l’année 2011?

    Ahmed Reda CHAMI : Durant l’année 2010, et suite à la sortie de crise de certains pays européens, nous avons intercepté les signes précurseurs d’une reprise du secteur industriel marocain.
    Les indicateurs de suivi des secteurs industriels, ayant subi la crise, présentent actuellement des signes de reprise. Le secteur du textile, dont l’export a stagné au même niveau que celui de 2009, représente l’exception. L’impact de l’inflation des cours des matières premières, le problème de capacités engendré par l’arrêt de l’activité d’un nombre important de sous-traitants, la  pénurie de la main d’œuvre ont conduits à l’incapacité de répondre aux attentes des clients.
    Le Chiffre d’Affaires du secteur de l’automobile à l’export qui avait enregistré une baisse de 28,5% en 2009 par rapport à 2008, a connu une croissance de 62,5% en 2010 par rapport à 2009.  Cette croissance est due essentiellement à :
    •    L’arrivée de commandes, destinées préalablement aux équipementiers des marchés de l’Europe de l’Est, au Maroc. Ce qui confirme, encore une fois, le potentiel du Maroc en tant que site compétitif de production et d’exportation ;
    •    Le maintien du marché automobile en Europe, suite au prolongement de mesures de soutien telle que « la prime à la casse » ;
    Il est important de rappeler l’implantation de d’équipementiers internationaux accompagnant le Groupe Renault durant l’année 201, la production est prévue en 2012.
    L’électronique a également enregistré une évolution positive à l’export, soit une croissance de 23,8% en 2010. Le secteur aéronautique n’est pas en reste puisqu’il a enregistré une croissance de 18% en 2010 par rapport à l’année 2008.

    Infomédiaire  : Comment pouvez-vous expliquer que certains secteurs ne sont pas encore  développés au Maroc comme l’électronique ou l’agroalimentaire et même le textile contrairement à l’offshoring ou l’automobile ?

    Ahmed Reda CHAMI : Pour le secteur du textile, je ne peux confirmer votre thèse, il est aujourd’hui le cœur battant de l’activité industrielle nationale et il est donc stratégique :
    •    +181 000 salariés, soient 39% des emplois industriels;
    •    Contribue à hauteur de 13% au PIB industriel;
    •    A affiché le plus de dynamisme à l’export, avec 24.2 milliards de dhs d’exportations en 2010.


    Par ailleurs, je tiens à signaler que le « Pacte Nationale pour l’Emergence Industrielle », propose un cadre de développement important dudit secteur, à travers la mise en œuvre de 11 mesures structurantes qui renforceront la stabilisation du tissu actuel et hisseront le potentiel de croissance à environ plus d’1 milliard de PIB avec création de 32000 nouveaux emplois à l’horizon 2015.


    Pour le secteur de l’agroalimentaire, je poserai la question autrement : « Pourquoi le secteur agroalimentaire ne se développe pas avec la même cadence que l’automobile et l’offshoring? » Et effectivement, les MMM prévus dans le cadre du Pacte affichent des réalisations contrastées.


    Il convient aussi de souligner que ce secteur est caractérisé par l’existence de trois catégories d’industries :
    1.    Les filières de base (industrie laitière, industrie sucrière, industrie des huiles, industrie des céréales et industrie des viandes), dont plus de 95% de la production est écoulée sur le marché local, ont connu une croissance annuelle moyenne de leur production de 6% sur les 5 dernières années. 
    2.    Les filières à fort potentiel à l’export, principalement constituées des industries de transformation des fruits et légumes sont fortement liées à l’amont agricole et par conséquent aux risques des aléas climatiques. 75% de la production de ces industries est exporté et elles disposent d’un fort potentiel de valeur ajoutée et de croissance qui est actuellement sous exploité (valorisation insuffisante des produits). Elles ont connu une stagnation globale à tous les niveaux durant les 5 dernières années.
    3.    Les filières intermédiaires (biscuiterie, chocolaterie, confiserie, boissons, etc.) sont confrontées à une rude concurrence liée aux produits d’importation, dans le cadre des ALE, elles subissent aussi et de plein fouet les surcoûts engendrés par les droits à l’importation des matières premières. Malgré cela, ces filières ont connu une croissance annuelle moyenne de leur production de l’ordre de 7% sur les 5 dernières années.
    Aussi, le développement de ce secteur est essentiellement conditionné par le niveau de la production agricole et le dynamisme de la demande intérieure et son importance.


    Afin de favoriser la croissance du secteur agroalimentaire, nous avons mis en place une stratégie de développement axée sur deux volets :
    •    Le volet agricole qui,  à travers le « Plan Maroc Vert », apportera des solutions pérennes et adaptées à l’impératif de l’augmentation de l’offre en matières premières destinées à la transformation et contribuera à l’émergence de projets intégrés, le ministère de l’agriculture en a la charge.
    •    Le volet industriel qui, à travers le « Pacte national pour l’émergence industrielle », constitue une stratégie volontariste reposant sur 5 initiatives :


    –   Un plan de développement des filières à fort potentiel à l’export ;
    –   Des plans de développement et de restructuration des filières nationales des denrées de base ;
    –   Un plan d’appui ciblé en faveur des « filières intermédiaires » ;
    –   Un programme de formation adapté au secteur ;
    –   La mise en place d’un réseau d’agropoles dans les principales régions à vocation agricole.


    Enfin, le secteur de l’électronique. Compte tenu des potentialités de développement qu’il a enregistré avant 2008, des opportunités qu’il offre aux investisseurs pour servir le marché européen, mais aussi à travers les études réalisées dans le cadre du « Pacte National pour l’Emergence Industrielle », il a été identifié parmi les métiers mondiaux du Maroc.


    Malheureusement, cette tendance positive a été handicapée par la crise économique qui a eu comme conséquence directe la rétraction de la demande au niveau de tous les marchés mondiaux, liés directement avec le secteur électronique (automobile, aéronautique, médical, etc.).
    Depuis 2010, le secteur électronique manifeste des signes de reprise marqués par une croissance de 20% par rapport à l’année 2009, et cette évolution positive, se confirme en 2011 étant donné l’implication des acteurs locaux dans des projets internationaux en cours.


    Il est très important de souligner la confiance placée au Maroc par des groupes internationaux tels que :
    •    Lear Corporation qui a mis en place une unité d’électronique embarquée à Rabat Technopolis  d’un montant d’investissement de 209 millions dhs, avec la création de 193 postes d’emplois ;
    •    Powerex Morocco (filiale de Powerex Inc USA) basé à la TFZ, spécialisée dans l’assemblage du semi-conducteur de puissance, permettra la création de 300 postes d’emploi et un transfert de 100% du savoir faire technologique en semi-conducteur des USA au Maroc ;
    •    D’autres créations sont en cours d’installation au Maroc pour servir à la fois le marché international et local, notamment le projet ALSTOM et les projets de l’énergie solaire et éolienne.


    En résumé, le secteur électronique est un secteur potentiel qui connaitra le niveau de croissance qu’il a enregistré avant crise.

    Infomédiaire : Quels sont les principaux obstacles de l’industriel marocain ? Et  quelle  est la position des investisseurs marocains dans l’industrie comparée aux étrangers ?

    Ahmed Reda CHAMI : En effet, certains obstacles subsistent notamment :
    •    L’adéquation des ressources humaines aux besoins du tissu industriel marocain et leur disponibilité quantitative et qualitative;
    •    La disponibilité du foncier ;
    •    L’accès au financement et son coût;
    •    Un environnement des affaires parfois déficient, notamment la complexité des procédures, la corruption et la sécurité judiciaire dans le domaine des droits des affaires;
    •    Les problèmes liés à l’exploitation, notamment les coûts d’énergie et de la logistique.
    Conscient de ces problèmes, le Ministère a prévu une batterie de mesures inscrites dans le « Pacte nationale pour l’émergence industrielle »  :
    •    La mise en place des plateformes industrielles intégrées, aux standards internationaux ;
    •    La mise en place des plans de formation orientés métiers développés en collaboration avec le département de la formation et  le privé ;
    •     Amélioration du Climat des Affaires dans le cadre du CNEA ;
    •    La création de l’Agence Marocaine pour le Développement des Investissements (AMDI) dédiée à la promotion et au développement des investissements:
    Concernant la position des investisseurs marocains, il existe des "champions nationaux", des industriels leaders dans leur domaine d’activité (ex : Ynna Holding dans la pétrochimie, Intelcia pour l’offshoring, OCP, etc.). Les partenariats entre industriels marocains et étrangers sont de plus en plus fréquents, sous forme de JV, sous-traitance…


    Ces dernières années, les projets, conventionnés dans le cadre de la commission des investissements, sont majoritairement portés par des sociétés marocaines, ceci démontre le dynamisme du tissu industriel marocain, particulièrement en période de crise internationale.
     
    Infomédiaire : Quel est votre premier bilan sur le Pacte national pour l’émergence industrielle et le Plan Maroc Vert ?

    Ahmed Reda CHAMI : Deux ans après la signature du « Pacte National pour l’Emergence Industrielle », devant Sa Majesté Le Roi Mohammed VI le 13 février 2009, d’importants chantiers ont été mis en œuvre, notamment celui de la formation et celui des infrastructures d’accueil appelées Plateformes Industrielles Intégrées (P2I).
    Concernant  la formation, les principaux chantiers lancés sont :
    •    L’élaboration des plans de formation pour les différents Métiers Mondiaux du Maroc;
    •    La création d’Instituts de formation spécialisés;
    •    La création de l’Ecole Centrale;
    •    L’élaboration de manuels d’aide à la formation pour les secteurs de l’Automobile, de l’Aéronautique, de l’Offshoring et de l’Electronique. 

    Concrètement :
    •    Les plans de formation textile/cuir et offshoring ont été élaborés et validés, ceux des autres secteurs sont en cours d’élaboration et ceux à cours terme ont été élaborés et validés ;
    •    La « Call Académie » pour la formation en langue française et Métiers des Centres d’Appels et a été lancée ;
    •    La formation à l’Ecole Supérieure de Création et de Mode a été mise en place ;
    •    La formation au sein de l’Institut des Métiers de l’Aéronautique sera lancée avant le 2ème trimestre 2011;
    •    Les formations au sein de l’Institut de formation de l’automobile dédié à Renault ont démarré et l’inauguration de cet institut est prévue pour le 22 Mars 2011;
    •    Des études sont en cours pour la création des Instituts de Formation aux Métiers de l’Automobile à Casablanca, Kenitra et Tanger;
    •    Lancement courant depuis février des études pour la création de l’Ecole Centrale;
    •    Des manuels d’aide à la formation ont été mis en place pour les secteurs de l’offshoring, de l’automobile, de l’aéronautique et de l’électronique.


    Concernant les infrastructures d’accueil, les travaux ont été lancés pour la mise en place des P2I prévues par le Pacte, certaines sont déjà opérationnelles, il s’agit de Casanearshore et de Technopolis.
    Etat de mise en œuvre des P2I:


    P2I offshoring :
    •    Casanearshore : 250000m² de surface totale dont une partie a déjà été livrée, la plateforme est opérationnelle et les prochaines livraisons auront lieu au 2ème trimestre 2011, avec la création de 10000 emplois ;
    •    Rabat Technopolis : 300000m² de surface totale dont une partie a déjà été livrée, la plateforme est opérationnelle et les prochaines livraisons auront lieu au 2ème trimestre 2011, avec la création d’environ 3000 emplois ;
    •    Fès Shore : 139000m² de surface totale. Les travaux d’aménagement sont en cours et la livraison est prévue pour le 4ème trimestre 2011;
    •    Tétouan Shore : 100000m² de surface totale. Les travaux d’aménagement sont en cours et la livraison est prévue pour le 1er trimestre 2012 ;
    •    Oujda Shore : 5000m² de surface totale. Les études sont en cours, le lancement des travaux d’aménagement est prévu pour Avril 2011et la livraison pour juin 2012 ;
    •    Marrakech Shore : 50000m² de surface totale. Les études sont en cours et la livraison au 3ème trimestre 2012.
    P2I Automobile :
    •    Kenitra Automotive City : 345ha de surface totale. Les travaux d’aménagement sont en cours et la livraison pour décembre 2011 ;
    •    Tanger Automotive City : 300ha de surface totale. Les études sont en cours, le lancement des travaux d’aménagement est prévu pour avril 2011 et les livraisons pour juin 2012 ;
    P2I Aéronautique :
    •    MidPark : 140ha de surface totale. Les études sont en cours, le lancement des travaux d’aménagement est prévu pour mai 2011 et les livraisons en juin 2012.
    P2I généralistes :
    •    Casablanca Ouled Saleh : 220ha de surface totale. La sélection de l’aménageur est en cours et les livraisons en juin 2012 ;
    •    Fès Ras Almaa : 425ha de surface totale. Les études sont en cours, le lancement des travaux d’aménagement est prévu pour juin 2011 et les livraisons en Juin 2012 ;
    •    TFZ extension : 110ha de surface totale. Les études sont finalisées, le lancement des travaux d’aménagement est prévu pour février 2011 et les livraisons en Juin 2011 ;
    •    La Technopole d’Oujda : 498ha de surface totale. Les travaux d’aménagement sont en cours et la livraison en Mars 2011.
    P2I Quartier National/Régional :
    •    Settat : 382ha de surface totale. Les études sont en cours, le lancement des travaux d’aménagement est prévu pour Mars 2011 et les livraisons en septembre 2012.

    Infomédiaire : En quoi le sommet national de l’innovation peut-il aider les jeunes entrepreneurs ou les  entreprises à innover  ou à se développer?

    Ahmed Reda CHAMI : Le sommet national de l’innovation nous a offert l’opportunité de mobiliser  les acteurs marocains de ce domaine, notamment les opérateurs économiques. Nous les avons sensibilisés davantage sur l’importance que revêt l’innovation, aujourd’hui, en tant que levier incontournable pour la création de richesse et d’emplois qualifiés. 


    Ce sommet a surtout été l’occasion de présenter la stratégie « Maroc Innovation », qui donne, en particulier à nos jeunes entrepreneurs et à nos entreprises, la visibilité nécessaire au dispositif mis en place par le Ministère de l’industrie pour stimuler et favoriser le développement de l’innovation au Maroc.
    Il s’agit principalement des instruments de financement adaptés aux besoins de chaque stade de la chaine de valeur de l’innovation, allant de l’idée jusqu’à la mise sur le marché, à travers notamment les programmes « Intilak » et « Tatwir ».


    Nous avons mobilisés, pour les quatres prochaines années, une enveloppe de plus  de 510 millions de dirhams, pour  ces mécanismes de soutien à l’innovation, et aujourd’hui nous invitons les jeunes porteurs d’idées innovantes et les entreprises à se mobiliser  pour en tirer le meilleur  profit.

    Infomédiaire : Pour le secteur des nouvelles technologies de l’information et de la communication, quel est le plan du ministère à moyen terme ?

    Ahmed Reda CHAMI : L’usage des TIC est un facteur essentiel pour l’émergence de la société du savoir, il peut activement contribuer au développement humain, à l’amélioration de la cohésion sociale et à la croissance de l’économie nationale.


    L’enjeu, dans le secteur des TIC pour les années à venir, est de pérenniser les avancées déjà réalisées et de mettre en place l’ensemble des conditions nécessaires pour que ledit secteur puisse continuer à jouer son rôle de moteur de croissance et d’accélérateur du développement, ainsi il permettra l’insertion du Maroc dans l’économie numérique mondialisée, via une intégration amplifiée et largement diffusée des TIC, que ce soit dans l’Etat, les administrations, les entreprises ou chez les citoyens.


    La vision n’étant pas, seulement, de développer une société utilisatrice des TIC, mais aussi, et surtout, de créer des atouts pour l’ensemble des citoyens dans la perspective de devenir des contributeurs solides à la civilisation universelle. A cet effet, quatre principes sont jugés essentielles pour le développement du secteur :
    •    Créer une dynamique en affichant une ambition forte et en définissant des objectifs à la fois ambitieux et réalistes ;
    •    Focaliser les priorités et mener des actions à fort impact en définissant un nombre limité de priorités, des mesures d’accompagnement et de conduite du changement, pour la réussite de la mise en œuvre des actions retenues
    •    Structurer la gouvernance et allouer les ressources adéquates en mettant en place une structure pérenne de gouvernance mobilisant les différentes parties prenantes publiques et privées et en évaluant les résultats et en réorientant, pragmatiquement, les efforts quand cela est nécessaire ;
    •    Inscrire l’action dans la durée : couvrir une période déterminée et prévoir un enrichissement progressif des ambitions.


    Ainsi, le plan « Maroc Numeric 2013 » est construit autour d’une vision et des ambitions claires pour le Maroc, visant à le positionner parmi les pays émergents dynamiques dans les TIC, notamment :
    •    Faire du secteur un des piliers de l‘économie ;
    •    Positionner le Maroc comme un hub technologique régional ;
    •    Faire des TIC une source de productivité et de valeur ajoutée pour les autres secteurs économiques et pour l’Administration Publique ;
    •    Faire des TIC un vecteur du Développement Humain.


    En effet, « Maroc Numeric 2013 » s’articule autour de 18 initiatives déclinées en 53 mesures concrètes et budgétisées, dont la planification et les responsables ont été définis.
    A ce titre, « Maroc Numeric 2013 » décline un cadre de gouvernance qui définit les rôles et les responsabilités de chaque partie prenante. Cette gouvernance est portée par le Conseil National des Technologies de l’Information (CNTI), institué par décret et présidé par le Premier Ministre. Le budget alloué, 5,2 milliards de dhs, est à la hauteur des ambitions.


    Le plan Maroc Numeric est décliné en quatre priorités stratégiques :
    •    Permettre l’accès, à tous les citoyens, à l’internet haut-débit et favoriser l’accès aux échanges et à la connaissance : Transformation sociale ;
    •    Mettre en œuvre un programme ambitieux d’e-gouvernement contribuant à l’efficience de l’Etat et des collectivités locales: Service public orienté usager ;
    •    Garantir l’informatisation des PME, pour accroître leur productivité, et contribuer à leur développement : Productivité des PME ;
    •    Développer des pôles d’excellence, avec un fort potentiel à l’export, en soutenant la croissance et l’entreprenariat dans le secteur des TIC ; et Développer l’offshoring IT : Industrie TIC.
    Egalement,  le plan Maroc Numeric 2013 prévoit deux mesures d’accompagnement :
    •    Instaurer les conditions pour susciter la confiance des citoyens et des entreprises en l’économie numérique : Confiance numérique ;
    •    Assurer la disponibilité en qualité et en quantité des compétences humaines : Capital humain.

    Infomédiaire : En quoi le programme Maroc Numérique 2013 peut-il aider le secteur des technologies de l’information à se développer et à s’exporter ?

    Ahmed Reda CHAMI : Les TIC et la mondialisation de l’économie fournissent de grandes opportunités dans la course au développement et la compétition internationale. Ceci constitue une opportunité particulière pour les pays en développement qui peuvent en profiter pour accélérer ainsi leur développement.
    En effet, l’impératif pour le Maroc est de se forger une vision claire, de définir les politiques appropriées et de les mettre en œuvre avec efficacité et rapidité.
    Ainsi, la stratégie Maroc Numeric 2013 a érigé un axe prioritaire baptisé « industrie des technologies de l’information » qui se décline en deux initiatives majeures ambitieuses pour la promotion et le développement des technologies de l’information notamment, le partenariat et pôles d’excellence et offshoring TI.


    1-    Partenariat et pôles d’excellence
    Cet axe a pour rôle de développer la filière locale TI en soutenant la création et la croissance des acteurs locaux ainsi qu’en favorisant l’émergence de pôles d’excellence à fort potentiel à l’export. L’objectif est de générer une croissance du PIB, environ 2,8Md MAD à horizon 2013, à travers la création de start-ups TIC et la croissance des entreprises actuelles du secteur. Cette ambition sera soutenue par la combinaison de politiques générales et de politiques spécifiques au développement des pôles d’excellence :
    – Mise en place des Politiques générales dédiées au secteur TIC: 
    Le but est de mettre à disposition des entrepreneurs et des entreprises du secteur des TIC un cadre adapté et des conditions attractives, dans lequel a été arrêté un ensemble d’actions pour agir sur les différents leviers améliorant le cadre sectoriel TIC, notamment :
    •    Mise en place d’une gouvernance nationale commune pour la coordination et le suivi des actions de soutien et de développement de l’innovation et de la R&D et consolidant la gestion des instruments d’appui aux projets innovants ;
    •    Mise en place des fonds d’investissement publics-privés de type capital-amorçage et capital-risque ;
    •    Mise en place des structures d’accueil attractives pour les start-up et entreprises TIC offrant une infrastructure de qualité et des services généraux et d’accompagnement de qualités. Ces structures seront créées dans le cadre de Partenariats Public Privé, à l’instar du Technopark de Casablanca ;
    •    Promouvoir la culture d’entreprenariat et d’innovation à travers l’intégration de cours et modules spécifiques dans les cursus et programmes d’enseignement et la mise en place d’incubateurs universitaires ;
    •    Développer des services d’assistance, dédiés aux entreprises TIC dans le but de favoriser leur croissance, qui s’articulent auteur d’assistance à l’export en termes de conseil et d’étude de marché ; d’aide au financement à travers la mise en place d’une offre IMTIAZ pour le secteur à fort potentiel et d’autre services tels l’assurance, la gestion de créances etc..


    Mettre en place des politiques spécifiques et ciblées :
    – Le but est de concentrer les efforts sur des domaines où la compétitivité TIC du Maroc reste importante et dans l’optique de voir émerger des entreprises locales en mesure de faire la différence sur les marchés internationaux. Dans ce cadre, un ensemble d’actions ont été arrêtées, notamment, la mise en place d’une structure à gouvernance mixte « Clusters TIC » regroupant différents acteurs (Etat, grandes entreprises, PME, opérateurs de l’enseignement et de la recherche) avec pour ultime objectif de faire émerger des projets innovants à forte valeur ajoutée dans les 4 niches TIC identifiés. Il s’agit d’activités présentant une rupture technologique, avec un marché mondial en croissance et non concentré, avec un marché local et dans lesquels le Maroc possède un atout concurrentiel pour l’export. Ces quatre niches TIC à développer en pôles d’excellence sont notamment, les services mobiles, les services monétiques, le web design et progiciels dédiés à pays similaires au Maroc (remboursement de santé dans l’e-gouv., place de marché agricole virtuelle, solutions PME adaptées, microcrédits…).


    Une structure dédiée à l’animation du cluster sera également mise en place. Elle aura pour rôle d’animer et de promouvoir son offre au niveau national et à l’international. Ainsi, un outil de financement de type capital risque, dédié aux activités qui seront développées dans les clusters sera mis en place. Il sera alimenté par les fonds du Contrat Programme APEBI-Gouvernement et par les fonds de R&D issus de la contribution des opérateurs Télécoms et correspondant à 0,25% de leur chiffre d’affaires.


    2-    Offshoring IT
    Il s’agit de conforter un leadership durable du Maroc sur le nearshoring IT francophone et monter en valeur ajoutée sur des spécialités pour préparer le développement vers de nouveaux marchés de l’offshoring IT.
    Et bien que l’off-shoring IT ait connu un démarrage rapide ces dernières années, l’enjeu est aujourd’hui d’accélérer son développement pour profiter pleinement des avantages compétitifs que le Maroc a su créer sur ce marché.
    Le Plan Impact vise à capter 50% de l’offshoring IT francophone et maintenir sa part  sur les autres marchés pour atteindre un chiffre d’affaires de 6Md MAD en 2013, soit un impact PIB de 3,7Md MAD et environ 16000 emplois créés.
    Afin de réaliser ces ambitions, il est nécessaire de réussir la montée en charge des acteurs déjà installés, car cela conditionne le renforcement de la crédibilité de la destination Maroc et garantit sa pérennité.

    Dans ce cadre, 4 initiatives clés ont été retenues:
    – Pilotage et Promotion de l’offshoring IT :
    Depuis 2009, cette première initiative a pour objectif de mettre en place, en association avec le privé, une structure dédiée au pilotage de la mise en œuvre de la stratégie sectorielle Offshoring en général et ITO en particulier, à la promotion de l’offre Maroc et à l’accueil et l’orientation des investisseurs. Cette structure sera composée notamment de ressources de réflexion stratégique et de promotion en liaison avec l’Agence Marocaine pour le Développement des Investissements (AMDI).


    – Fidélisation des acteurs existants :
    Le but étant de pérenniser les succès rencontrés et de consolider les acquis de l’offshoring IT marocain. A cette fin, une importance particulière a été donnée à la réussite de la montée en charge des acteurs déjà installés.

    Dans ce cadre, les actions suivantes ont été retenues:
    •    Garantir un cadre juridique et législatif pour la protection des données personnelles conforme aux normes et standards internationaux par la mise en application de la loi 09-08, afin de permettre aux offshorers de respecter les réglementations de leurs pays d’origine, de développer leurs activités au Maroc et promouvoir auprès des professionnels  la  conformité avec les normes internationales ;
    •    Garantir de façon dynamique la « compétitivité coût » de l’ensemble des facteurs, à travers des incitations fiscales, des aides au financement de la formation, des loyers des zones dédiées…et ceci dans le but d’offrir un environnement économique compétitif et conditions nécessaires en vue de pérenniser les investissements réalisés et les emplois créés dans le secteur de l’Offshoring IT ;
    •    Proposer des infrastructures aux standards internationaux en réajustant l’existant et- en accélérant le déploiement de nouvelles zones, et renforcer les cahiers des charges pour les futures zones dédiées ;
    •    Accélérer la formation de ressources humaines adaptées aux besoins des entreprises et renforcer le dispositif pour s’assurer de l’homogénéité de la qualité des formations, ceci dans le but d’assurer aux offshorers l’accès à des ressources qualifiées.


    – Language shoring :
    Il s’agit de mener un ensemble d’actions prioritaires en vue de positionner le Maroc comme leader du « language shoring » francophone, notamment :
    •    Poursuivre l’attraction des grandes SSII françaises, essentiellement de taille moyenne, qui ne sont pas encore installées au Maroc, promouvoir le développement de l’offshoring et valoriser l’offre Maroc (plan de communication cible et  multi-canal) vers les entreprises et l’administration française, en faisant la promotion de l’offshoring comme levier de performance et en valorisant la qualité du travail au Maroc ;
    •    Mener des actions spécifiques, vis-à-vis des grands donneurs d’ordre francophones en général et français en particulier, afin d’installer des captives IT au Maroc ;
    •    Développer les filières de formation continue et double formation (technique, gestion des entreprises) pour renforcer les compétences métiers des ressources humaines, orienter les formations universitaires afin d’être capable de traiter le périmètre des activités ITO des offshorers captifs et promouvoir les métiers de l’offshore auprès des ressources tic expérimentées travaillant au Maroc et a l’étranger.
    •    Réaliser une veille technologique, en partenariat avec les offshorers, afin de décider des spécialités fonctionnelles et sectorielles sur lesquelles le Maroc devra se focaliser pour monter en valeur ajouté.
    Spécialités internationales
    Dans la perspective d’une recherche permanente de valeur ajoutée et de nouveaux marchés porteurs et afin de tirer parti de la base clientèle francophone existante, il est devenu nécessaire d’identifier les futures spécialités ITO du Maroc et les métiers spécifiques à développer. Il s’agit notamment de :
    •    Développer des spécialités fonctionnelles sur certains progiciels spécifiques, en  identifiant des logiciels novateurs utilisés par les grandes entreprises et l’Administration française et développant une compétence d’intégration locale sur des progiciels novateurs ;
    •    Développer des spécialités sectorielles et monter en compétences via une meilleure connaissance des métiers à travers la formation et les partenariats ;
    •    Développer des spécialités techniques, que ce soit sur les technologies vieillissantes (Mainframe par exemple) ou émergeantes (Dotnet par exemple) ;
    •    Développer les cours d’anglais à destination des ressources ITO et promouvant l’apprentissage des autres langues étrangères, parlées par les pays européens (espagnol, italien, et allemand), afin de permettre l’accès à de nouveaux marchés;
    •    Développer, en partenariat avec le secteur privé, des actions de communication pour promouvoir les expertises du Maroc dans des pays européens autres que la France (Allemagne, Italie, Espagne) et au canada.

    Infomédiaire : Un mot sur  le retour de Nissan à l’usine  Renault de Tanger ?

    Ahmed Reda CHAMI : Compte tenu de la crise qui a touché le secteur de l’automobile en 2009, Nissan avait décidé de geler son investissement à Tanger. Lors de la conférence de presse de M. Ghosn, tenue à rabat en Juin 2009 et de la conférence de presse de février 2010, il a annoncé le retour de Nissan à Tanger.