Hakan Gurdal, Directeur Général de Ciments du Maroc

    Infomédiaire : Hakan Gurdal, vous êtes Directeur Général de Ciments du Maroc depuis septembre 2017. Depuis quand HeidelbergCement est-il actif au Maroc ?

     Hakan GurdalCiments du Maroc a rejoint le groupe HeidelbergCement en 2016 lors de l’acquisition d‘Italcementi par HeidelbergCement. Mais l’entreprise jouit d’un historique important : elle a notamment été introduite à la bourse marocaine le 24 juin 1969. Nous pouvons donc être fiers de célébrer notre 50e anniversaire de cotation cette année !

    Pour HeidelbergCement, l’acquisition de 2016 représentait une réelle opportunité car le Maroc a toujours bénéficié de fondamentaux macroéconomiques solides tels que la croissance de la population et du PIB, l’aide publique au développement des infrastructures ainsi qu’un environnement stable et propice aux affaires. Nous avons conservé la forte marque locale de Ciments du Maroc, ainsi que ses programmes de responsabilité sociale et environnementale, le secteur du ciment étant par nature très local.

    Infomédiaire : Vous êtes à la fois Directeur Général de Ciments du Maroc et membre du Directoire de HeidelbergCement en qualité de Responsable de la Région Afrique-Est du Bassin Méditerranéen. N’est-ce pas trop de travail pour un seul homme ?

    Hakan Gurdal: Bien sûr, cela représente beaucoup de travail et je dois avouer qu’il m’arrive de souhaiter que la journée dure plus de 24 heures. Mais le Maroc est un marché très important et je souhaitais personnellement prendre en charge l’intégration de Ciments du Maroc après l’acquisition d’Italcementi. Aujourd’hui, l’entreprise se porte bien et nous recherchons le bon successeur. Je pense que nous devrions pouvoir présenter le candidat adéquat très prochainement.

     Infomédiaire : Sous votre direction, la société a obtenu d’excellents résultats opérationnels. Pouvez-vous nous en dire plus ?

    Hakan Gurdal: Ces dernières années ont été marquées par des conditions de marché difficiles au Maroc. La consommation de ciment est passée de 14,3 millions de tonnes en 2015 à 13,3 millions de tonnes en 2018. HeidelbergCement étant l’un des meilleurs opérateurs du secteur, l’intégration réussie de Ciments du Maroc a néanmoins permis à la société de surperformer le marché, principalement grâce aux programmes d’excellence opérationnelle de HeidelbergCement et à l’accès aux marchés extérieurs par le biais des réseaux commerciaux du groupe. Nous sommes aujourd’hui un « n° 2 » solide sur le marché marocain avec une capacité de production de 5,3 millions de tonnes par an. Nos 800 employés, grâce à leur forte motivation, ont rendu ce succès possible et notre performance en 2018 est à la hauteur de nos prévisions.

    Infomédiaire : L’intégration de Ciments du Maroc dans le groupe HeidelbergCement a-t-elle été difficile ?

    Hakan Gurdal : Non, absolument pas ! Nos employés sont ouverts aux nouvelles idées et améliorations et sont très bien formés. C’est la clé de notre succès continu. De plus, Ciments du Maroc exploite des usines modernes et bien entretenues, ce qui se traduit par un processus de production très efficace. Mais parfois, de petits changements peuvent avoir un impact énorme. L’accès à une ingénierie aux standards internationaux et à un réseau commercial solide comme ceux d’HeidelbergCement ont permis à Ciments du Maroc d’améliorer son excellence opérationnelle, d’ouvrir de nouvelles opportunités de marché, ainsi que de développer de nouveaux procédés de production tels que l’utilisation de carburants de substitution.

    Infomédiaire : S’agit-il des carburants alternatifs dédiés à la réduction de l’empreinte carbone de la production de ciment ? Selon vous, quels seront les principaux défis des prochaines années pour votre groupe et pour Ciments du Maroc en particulier ?

     Hakan Gurdal : L’une des principales priorités du groupe HeidelbergCement, soutenu par notre centre de technologie, est le développement durable de nos activités dans le monde entier, notamment en termes d’empreinte écologique. Le Groupe a commencé à remplacer les combustibles fossiles par des combustibles de substitution (scories, eaux usées, déchets, pneus, etc.) il y a plusieurs années et a acquis une expérience précieuse sur ce sujet essentiel. Cependant, la substitution de combustibles fossiles ne suffit pas pour atteindre les objectifs climatiques. Nous avons donc présenté à la COP22 à Marrakech un projet de ferme d’algues dans l’une des usines de Ciments du Maroc afin de convertir le CO2 issu du processus de production en biomasse pouvant être utilisée comme aliment pour animaux. HeidelbergCement travaille sur ce projet afin de réduire l’empreinte carbone et d’atteindre l’objectif de réduction de 30% d’ici 2030 fixé par l’ONU.

    Infomédiaire : Où voyez-vous un potentiel de croissance pour le ciment dans les années à venir ?

    Hakan Gurdal: Saisir les opportunités de croissance dans un environnement de plus en plus complexe sera sans aucun doute l’un des défis les plus difficiles à relever au cours des prochaines années. Comme vous le savez peut-être, l’Afrique abrite l’un des potentiels de croissance les plus élevés au monde en termes de développement des infrastructures. En tant que groupe, nous occupons des positions de leader sur le continent africain grâce à notre présence dans 16 pays avec 27 usines. Le Maroc servira également de plaque tournante pour optimiser nos activités en Afrique de l’Ouest

    D’un point de vue économique, le Maroc est un pays très intéressant pour nous, car il vise à accélérer son développement industriel. Les ambitions du Royaume impliquent nécessairement un développement important des infrastructures, comme nous l’avons vu avec le récent lancement de la ligne de train à grande vitesse entre Casablanca et Tanger. OCP et BNEE ont également annoncé d’importants projets d’infrastructure, de même que la construction de toute la nouvelle zone urbaine de Casa Anfa qui stimulera la demande pour nos produits. Par ailleurs de nombreux projets de moindre envergure sont en cours et nous nous attendons à une reprise du marché du ciment.  Les dépenses d’infrastructure demeureront l’un des éléments moteurs du développement du pays. Ciments du Maroc est très bien placé pour saisir ces opportunités. Nous nous attendons à une forte reprise du marché marocain, ce qui fait du Royaume un des marchés les plus importants et les plus attractifs pour HeidelbergCement en Afrique.

    Infomédiaire : Comment allez-vous positionner Ciments du Maroc dans un avenir proche ?

    Hakan Gurdal :Ciments du Maroc occupe une position solide sur son marché grâce à son approche d’intégration verticale. Nous nous concentrons non seulement sur le ciment, mais également sur les granulats et le béton prêt à l’emploi. Nous serons également ouverts à un renforcement de notre position sur le marché par le biais d’acquisitions complémentaires et disposons de suffisamment de liquidités pour réaliser de telles opérations.

     Un autre défi sera la digitalisation de notre industrie. La technologie d’aujourd’hui nous permet de faire des choses impensables il y a encore quelques années. Auriez-vous pensé il y a 5 ans que vous pourriez depuis votre smartphone commander une pizza en un simple clic puis en suivre la livraison en temps réel ? Nous souhaitons également utiliser cette technologie et proposer à nos clients des services nouveaux et améliorés.

    Ce que j’ai appris chez HeidelbergCement, c’est qu’il est toujours possible d’améliorer l’excellence opérationnelle. Le lien étroit et le soutien du groupe nous aideront à améliorer nos résultats.

    Infomédiaire : Comment cela se traduit-il pour vos actionnaires ?

    Hakan Gurdal: Ciments du Maroc a continué de se concentrer sur la génération de liquidités pour ses actionnaires et reste l’un des titres les plus attractifs au Maroc en termes de rendement de l’action. Le bilan de la société est robuste et présente suffisamment de liquidités pour soutenir une stratégie combinant acquisitions sélectives et rendement pour les actionnaires. En 2018, Ciments du Maroc a versé un dividende annuel de 75 MAD par action et un dividende exceptionnel de 25 MAD par action. Compte tenu de notre performance de 2018, nous serons en mesure d’augmenter le dividende annuel en 2019. Notre objectif est de faire croître le dividende et de restituer de la trésorerie à nos actionnaires, en cohérence avec la croissance de nos bénéfices pour les années à venir.