Brahim Fassi Fihri, Président de l’Institut Amadeus

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    Infomédiaire : Pouvez-vous présenter à nos lecteurs l’institut Amadeus? Quel est le rôle de ce think tank dans la vie politique et économique du Royaume ?

    Brahim Fassi Fihri : L’Institut Amadeus est un think tank marocain, politiquement indépendant, créé en 2008 et basé à Rabat. Il se positionne comme un espace de réflexion et un créateur de débats par excellence. Notre ambition première est d’apporter une contribution au débat public marocain sur des questions politiques et économiques. Dans un cadre plus global, l’objectif de l’Institut est de se mouvoir en porte-voix des sujets de préoccupations des pays du Sud.

    Notre défi est de conforter ce rôle de facilitateur de débats et d’échanges tout en apportant une réelle valeur ajoutée intellectuelle aux discussions à travers un ensemble d’analyses produites par nos experts permanents ainsi que celles des experts associés à l’international.

    C’est ainsi qu’outre le forum MEDays son événement phare et as opérationnel dont il est l’initiateur et l’organisateur, l’Institut Amadeus s’est distingué depuis sa création en 2008 au travers de l’organisation et de la réflexion scientifique en amont de divers workshops et tables rondes portant sur des axes thématiques prioritaires ainsi que ses activités de publication.

    Infomédiaire : Qu’avez-vous préparé pour cette 4ème édition des Medays ? Comment le printemps arabe sera abordé dans cette édition, et pensez-vous que cette édition sera affectée par les circonstances négatives de la région et monde en général ?

    Brahim Fassi Fihri : Le Forum MEDays, qui se tient Sous le Haut Patronage de Sa Majesté le Roi Mohammed VI, est la consécration du travail de l’Institut Amadeus pendant toute l’année. Nous nous fixons comme challenge de pouvoir associer les objectifs de l’Institut avec les thématiques du Forum.

    Ce Forum qui se veut opérationnel permettra aussi de proposer des solutions pratiques et opératoires, pour la mise en place d’une politique de coopération inclusive et concertée permettant l’échange d’expertises des différents acteurs du Sud sur des questions prioritaires. Ces débats déboucheront sur des recommandations pratiques, mais également sur la définition, en concertation avec les pays du Nord et les membres du G20, d’un protocole de collaboration interrégional, permettant l’éclosion et la gestion de projets à géométries variables.

    La quatrième édition du Forum MEDays, dont la thématique générique est le « Sud dans la gouvernance mondiale », intervient dans un contexte national, régional et international exceptionnels. L’année 2011, a connu en effet, une multitude de bouleversements sans précédents, heureux ou malheureux. Le monde arabe s’est mis en mouvement dès le début du mois de janvier avec la chute de Ben Ali. En février ce fût le tour de Moubarak, conduisant irrémédiablement aux soulèvements en Lybie, au Yémen et en Syrie.

    De cette année on retiendra également le Tsunami au Japon et l’accident de Fukushima, la victoire d’Alassane Ouattara, la mort d’Oussama Ben Laden, la crise de l’Euro, le déclassement de la note souveraine américaine, la demande d’adhésion de la Palestine au Nations Unies et la propagation mondiale du mouvement des Indignés. Le Maroc a connu également une accélération importante du processus de réformes dans notre pays. Le 25 novembre prochain, les marocains seront appelés aux urnes pour participer aux premières élections législatives d’une nouvelle ère constitutionnelle.

    L’ensemble de ces événements ont considérablement modifié nos lectures et nos analyses. Ils seront tous discutés et débattus lors des MEDays 2011, autour de personnalités ayant pris part ou vécu de près ces événements historiques. Une place importante sera consacrée dans nos discussions aux « Printemps Arabes ». Les élections en Tunisie et la proclamation de la libération de Lybie par le Conseil National de Transition (CNT), sont des premières indications importantes sur l’avenir de la région. Nous avons également le recul nécessaire pour faire, avec les principaux acteurs de ces changements, un premier bilan des révolutions dans le monde Arabe.

    C’est un élan de libertés portés par les peuples qui a conduit à une accélération de l’Histoire, sans précédentes dans la région depuis les indépendances. La rue arabe, souvent caricaturée en Occident, s’est battue (se bat encore aujourd’hui au Yémen et en Syrie) pour retrouver sa dignité. Cet «éveil arabe» est la démonstration absolue que la région n’est pas exsangue aux valeurs universelles de démocratie et de libertés. Ces acquis doivent être préservés et renforcés malgré les nombreuses inquiétudes nées d’une certaine radicalisation d’une importante partie des populations arabes.

    La pacification de la Lybie et le désarmement des populations sont décisifs. Les tensions intercommunautaires en Egypte sont vives. En Syrie la situation dégénère de jour en jour, les hésitations des puissances internationales ne sont guères rassurantes. Le risque de radicalisation est réel. La mort d’Oussama Ben Laden peut conduire la nébuleuse d’Al Qaeda, renforcée par la porosité de la bande sahelo-saharienne et par la faillite de l’Etat yéménite, à multiplier ses opérations.

    Le Forum MEDays, qui dès sa création en 2008, n’a cessé de mettre en lumière les limites du partenariat en Méditerranée, est en 2011 plus que jamais utile pour solidifier les acquis des « Printemps arabes ». Au Maroc, en plein évolution, ce Forum permettra de regrouper pour la première fois, dans le cadre d’une conférence internationale informelle, les principaux acteurs des changements dans la région avec les principaux décideurs internationaux.

    Parmi ces personnalités on retrouvera, compte Mahmoud Jibril, Président du Conseil exécutif du Conseil national de transition (CNT), Ahmet Davutoglu, Ministre turc des Affaires Etrangères, Raila Odinga, Premier Ministre du Kenya, Salam Fayyad, Premier Ministre Palestinien, Saeb Erakat, Négociateur en chef de l’Autorité Palestinienne, Alejandro Toledo Manrique, ancien Président du Pérou, Nabil Abdellah Al Arabi, Secrétaire Général de la Ligue Arabe, Sheikh Khalid Ibn Ahmad Al Khalifa, Ministre des Affaires Etrangères du Bahrain, Nacer Judeh, Ministre des Affaires Etrangères de Jordanie, Morgan Tsvangiraï, Premier Ministre du Zimbabwe, Andrés Pastrana Arango, ancien Président de Colombie, Sven Alkalaj, Ministre des Affaires Etrangères de Bosnie, Teodor Baconski, Ministre des Affaires Etrangères de Roumanie, Bernardino Lèon, Représentant Spécial de l’Union Européenne pour la Méditerranée, Cheick Sidi Diarra, etc.

    Outre ces personnalités, de nombreux ministres venus de près de 80 pays ont également déjà confirmé leur venue, parmi lesquels de nombreux ministres venus entres-autres du Monténégro, du Soudan, du Mali, de Hongrie, du Libéria, du Togo, du Bénin, des Comores, du Sénégal, du Brésil, de Tunisie, du Pakistan, d’Italie, de Chine, de Dominique, de Grenade, de Guinée et de Côte d’Ivoire.

    Infomédiaire: Pensez-vous que les Medays aident-ils le Maroc à renforcer son engagement dans la coopération Sud-Sud ?

    Brahim Fassi Fihri : Les MEDays peuvent être considérés comme un think tank à ciel ouvert, puisque plus d’une trentaine de problématique ont été traitées à travers les différents panels. Forum MEDays s’inscrit désormais dans l’agenda des plus grandes conférences internationales. En tant qu’initiateur de ce Forum mais également en tant que marocain, je me réjouis du rayonnement grandissant de des MEDays qui ont été créés et conçus pour être le Forum du Sud. Après seulement trois éditions, les MEDays peuvent compter sur un réseau exceptionnel construit au fur et à mesure des années. Ce réseau sera sensiblement renforcé à l’occasion de la 4eme édition.

    Les MEDays représentent indéniablement une plate-forme de promotion des grandes thématiques portées par le Royaume et notamment de son engagement dans la promotion de la coopération Sud-Sud.

    Je voudrais ajouter que la participation d’autant de hautes personnalités internationales, au Forum MEDays, qui se déroule à une semaine des élections au Maroc, est un gage de confiance important apportés aux réformes engagées dans notre pays depuis le Discours Royal du 9 mars. Il est évident que dans le contexte régional actuel, le Maroc est l’un des seuls pays de la rive sud de la Méditerranée, où ce type d’événement peut avoir lieu.

    Infomédiaire: Quel est votre bilan du G20 de Cannes ? Comment peut-on renforcer les partenariats Nord-Sud ?

    Brahim Fassi Fihri : Je retiens deux moments forts du G20 de Cannes. Premièrement, la gestion assez réussie du dossier grec suite à l’annonce, aujourd’hui avortée, par l’ex Premier Ministre Georges Papandreou, de l’organisation d’un référendum sur le plan d’aide européen à la Grèce.

    Secundo, je me réjouis que les pays membres du G20 aient pu se mettre d’accord sur la mise en place de taxes sur les transactions financières. Il s’agit d’une importante décision, que le Forum MEDays soutient depuis 2009.