Avec toute la célérité que requiert la situation, mais aussi avec le discernement qu’exige la préservation de la santé de ses citoyens, le Maroc n’a pas mis beaucoup de temps pour prendre une décision claire et souveraine sur l’utilisation de la chloroquine pour le traitement des malades du nouveau coronavirus (Covid-19).


Le Royaume, qui a développé une stratégie bien propre à lui dans la gestion de cette crise sanitaire planétaire, s’est fié au jugement de ses spécialistes et scientifiques, qui se sont accordés sur la pertinence du recours à une substance ayant fait ses preuves notamment en Chine, premier épicentre de la pandémie au monde.


Suivant une démarche méthodique dans le processus d’adoption du traitement, le ministère de la Santé, dont les simples faits et gestes sont passés à la loupe en ce moment, a engagé un débat serein autour de cette question, qui faisait des remous sous d’autres cieux et est devenue un sujet à surenchère. Il fallait surtout prendre vite les rênes de l’initiative pour couper court aux supputations et extrapolations les plus inouïes.


Quelques jours ont suffi pour trancher au sein de la commission scientifique et technique, d’autant que la chloroquine n’est pas une substance étrangère aux spécialistes marocains, qui prescrivent, depuis des lustres, les médicaments qui la contiennent pour tous ceux se rendant en Afrique.


Par expérience, toutes les personnes ayant voyagé dans le contient, en plus d’être vacciné en fonction de leur destination, ont eu à avaler des comprimés à base de chloroquine avant, durant et après leur séjour. Généralement, ces médicaments sont sans conséquence pour celui qui les prend.


C’est ce que confirme d’ailleurs le professeur Abdelfattah Chakib, spécialiste des maladies infectieuses au CHU Ibn Rochd de Casablanca: « Comme les autres médicaments, il peut avoir des effets secondaires mineurs surtout quand il est pris pour une courte période comme les effets gastro-intestinaux ».


Catégorique sur l’efficacité de la chloroquine pour le traitement du Covid-19, le professeur Chakib, grand connaisseur des maladies virales, regrette même que « dans le passé, elle n’ait pas été très utilisée pour traiter beaucoup de virus ».
Venant de la bouche d’une personne ayant le sens de la mesure et pesant bien ses mots, cette appréciation atteste que les responsables marocains ont fait le meilleur choix possible dans cette situation d’urgence, qui ne supporte pas les polémiques de luxe.


Pour étayer son argumentaire et celui de ses collègues, ce spécialiste se réfère, en toute humilité scientifique, à des études menées par des confrères dans d’autres pays et ayant débouché sur le même constat, notamment en Chine, en France ou en Tunisie.


A l’origine du débat houleux sur le recours à la chloroquine, l’infectiologue anticonformiste Didier Raoult, longtemps décrié et même raillé chez lui, a eu, au final, gain de cause dans son pays, la France, après la publication, jeudi 26 mars 2020, au Journal Officiel d’un décret autorisant notamment la prescription de l’hydroxychloroquine aux malades du coronavirus.
La victoire du professeur Raoult, qui dirige l’institut hospitalo-universitaire (IHU) de Marseille, conforte tous ceux qui ont cru en l’efficacité d’un médicament peu onéreux et donne espoir à des milliers de personnes infectées de pouvoir guérir, après que tous les laboratoires du monde ont échoué à inventer un traitement. 


Autre point positif à l’actif de la stratégie marocaine de la crise, c’est que les autorités sanitaires ne se sont pas posé trop de questions sur le comment de la chose, puisque la commission scientifique et technique du ministère de la Santé a décidé de prescrire la chloroquine pour tous les malades, pas seulement les cas graves
« Dans le monde, il y a deux attitudes. Il y a certaines équipes qui ont prescrit la chloroquine à tous les malades, comme c’est le cas en Chine. Les Français ne l’ont administrée que pour les malades graves », avait expliqué le professeur Chakib dans un interview exclusive.


Quand se dissipera inéluctablement la poussière du coronavirus, on se rendra compte, très probablement, que le Maroc a réussi à mettre au point une gestion intégrée exemplaire d’une crise complexe, multidimensionnelle et au coût très élevé.