Aziz Akhannouch, ministre de l’Agriculture et de la pêche maritime

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    Infomediaire : Quels sont les grands défis du ministère de l’agriculture et de la pêche maritime ?
     
    Aziz Akhannouch : Nos défis découlent principalement des directives des grandes stratégies structurantes lancées dans les deux secteurs de l'agriculture et de la pêche. Des stratégies inspirées par les Hautes orientations de Sa Majesté le Roi Mohammed VI que Dieu l'Assiste. 
    Les challenge liés au secteur agricole passent d'abord par deux points essentiels: la consolidation de la sécurité alimentaire du pays pour une population croissante et dont la composante urbaine est de plus en plus importante et la promotion de l'agriculture au rang de secteur économique compétitif à travers l’amélioration des revenus des agriculteurs, l’accroissement du PIB agricole et le doublement des exportations à l’horizon 2020,etc. 
    Dans un contexte mondial marqué par la raréfaction des ressources et les changements climatique, nos défis sont également liés à la sauvegarde des ressources naturelles par la rationalisation de leur utilisation et la conservation de la biodiversité.
    sur un autre plan, nous nous sommes également fixé l'objectif de base de mener un développement équilibré du secteur à travers le Maroc . Cela passe par l’harmonisation intra- et inter-régionale du développement agricole à travers les infrastructures et aménagements et les différents projets qui y sont lancés.
    Pour le secteur de la pêche L’objectif assigné par la stratégie Halieutis est de mettre en place des politiques publiques volontaristes susceptibles de faire du secteur halieutique un moteur de croissance stable de l’économie marocaine. L’atteinte de cette vision nécessite de lever les freins qui empêchent l’essor de la pêche maritime marocaine. Cela nécessite l’élaboration d’une  gestion optimisée de la ressource halieutique à travers la définition de plans d’aménagement des pêcheries et la promotion de l’aquaculture. Ensuite, il s’agit d’adapter l’effort de pêche et les infrastructures portuaires pour renforcer les conditions de débarquement des captures. Parallèlement, l’ancrage du secteur dans le développement économique passe par la promotion de l’industrie de la pêche en lui permettant un meilleur accès à la ressource, la conquête de marchés porteurs à l’international et l’encouragement de la consommation nationale de poisson. Tous ces défis doivent s’accompagner par l’instauration d’une gouvernance solide du secteur et d’un dispositif juridique adapté
     
    Infomediaire : Comment votre département ministériel peut-il promouvoir et moderniser l’agriculture marocaine ?
     
    Aziz Akhannouch : Pour la promotion et la modernisation de l’Agriculture marocaine, Le Maroc met en œuvre la  stratégie Plan Maroc Vert qui tourne autour du triptyque suivant : La réalisation progressive de 550 Projets solidaires avec un investissement programmé de  15 à 20 Milliards DH sur 10 ans dans le  cadre du Pilier II ; la réalisation progressive de 700 à 900 projets d’intensification et de modernisation à l'aide d'un investissement de 110 à 150 Milliards DH sur 10 ans  dans le cadre du Pilier I et enfin l'amélioration de l’environnement de ces projets en rationalisant les facteurs transverses notamment le foncier, l'irrigation,  la valorisation, la commercialisation, etc.
     
    Afin de réussir ces objectifs, nous avons cherché à nous doter des moyens nécessaires qui sont, entre autres, l’amélioration du budget du Ministère ; la réforme du fonds de développement agricole et l’augmentation de son budget; la restructuration du Ministère de l’Agriculture ; la conclusion de contrats programmes entre l’Etat et les interprofessionnels pour la promotion de leurs filières ou encore la mise en place d’une structure "Project management office" (PMO) pour le suivi et la résolution des contraintes de la mise en œuvre des contrats programmes.
     
    Infomediaire : Quel bilan pourriez vous tirer à ce jour concernant le plan Maroc vert ? 
     
    Aziz Akhannouch : Depuis son démarrage le Plan Maroc Vert a enregistré de multiples avancées sur divers plans qu’il serait difficile de synthétiser. Je citerai toutefois les avancées qui me semblent majeures notamment l’évolution du PIB agricole qui affiche un trend haussier, depuis l’année 2000. En effet, la mobilisation active de tous les acteurs autour de la stratégie Plan Maroc Ver a replacé le secteur agricole au centre de l’économie marocaine et a permis au secteur agricole de montrer une forte résilience à la crise financière internationale étalée sur une Bonne partie de 2007 et 2008. 
    Il est important également de rappeler, en termes de réalisations, le lancement de 108 projets pilier I qui totaliseront à terme un investissement global de 25,5 Milliards Dirhams et de 224 projets pilier II qui atteindront à terme un investissement de 8,83 Milliards Dirhams. Nous avons, par ailleurs, enregistré de grandes avancées dans les domaines de l'économie d'eau avec l'équipement de 129.000 hectares en  micro-irrigation. D'autres chantiers ont particulièrement bien avancé comme la mobilisation du foncier dans le cadre du partenariat public privé, l'amélioration de la disponibilité et de l’utilisation des semences sélectionnées et des plants certifiés ou encore la nette amélioration de l’équipement des exploitations agricoles.
     
    Infomediaire : Comment votre ministère accompagne les petits agriculteurs marocains ? 
     
    Aziz Akhannouch : Le Plan Maroc Vert accompagne les petits agriculteurs d'abord la promotion de l’économie solidaire. Ceci passe par la mise en œuvre de projets pilier II sur des territoires déterminés au profit de la petite paysannerie. Ces projets visent l’amélioration des revenus des petits agriculteurs à travers l'augmentation des taux de subventions octroyée dans le cadre du Fonds de Développement Agricole (FDA) et autres mesures tel l’encouragement de l’agrégation, l’amélioration de l’infrastructure de valorisation et de commercialisation et de l’encadrement et le conseil agricole.
    Nous avons travaillé ensuite sur plusieurs axes de soutien et d'encadrement visant l’atténuation des chocs subies par les petits agriculteurs à travers la rénovation et extension de l’assurance agricole, la prise en charge par l’Etat de programmes de sauvegarde du cheptel en cas de nécessité ou encore l’octroi d’aides aux sinistrés en cas de catastrophe naturelle.
    Infomediaire : Quel avenir pour les produits marocains sur le marché européen ? 
     
    Aziz Akhannouch : Un avenir très prometteur je dirai. Les raisons de ces perspectives optimistes sont multiples et nous trouvons à leur tête le nouvel Accord de libre échange entre le Maroc et l'Union Européenne dont l'entrée en vigueur est effective depuis le début du mois d'octobre courant. Un accord qui offre de meilleures conditions d’accès au produit marocain sur le marché européen. Tout au long du processus d'adoption de cet accord qui a été long et tumultueux, nous avons pris conscience de la nécessité de rapprocher les opérateurs des deux bords afin d'installer de bonnes conditions d'échange et d'écoute de part et d'autres. Nous œuvrons dans ce sens avec nos partenaires européens et c'est une initiative qui, selon moi, comptera pour beaucoup dans l'amélioration du positionnement de l'agriculture marocaine en Europe.
    Par ailleurs le Maroc a entrepris un ensemble de mesures visant l'amélioration de son positionnement à l'export et ce à travers le renforcement de ses infrastructures de logistique ou encore l'approche plus offensive de promotion des exportations autour de laquelle une grande réflexion est menée aujourd'hui. 
     
    Infomediaire : Selon vous, le Maroc risque-t-il une pénurie de blé dans les mois à venir ?
     
    Aziz Akhannouch : Nous estimons que le Maroc ne court pas un tel risque pour diverses raisons. Actuellement le marché mondial du blé ne montre  pas de pénurie à l'image de la situation de 2007. Le principal indicateur du marché, rapport stock /consommation affiche 27% actuellement ce qui constitue un niveau confortable. Il est indéniable que le marché reste tendu et le restera, selon les estimations, jusqu'à la fin de l'année le temps de connaître les niveaux des emblavements des principaux producteurs.
     
    A côté de cela, il faut signaler que le Maroc a basé sa politique de sécurité alimentaire sur un équilibre rationnel entre la production nationale et les importations. Notre pays gère ainsi  son approvisionnement en fonction des disponibilités de la production nationale et les perspectives du marché mondial. A cet effet, l'ouverture des frontières  a été décidée au bon moment pour sauvegarder l'intérêt aussi bien des producteurs que des consommateurs. 
     
    Actuellement le Maroc se maintient à un niveau de stock économiquement confortable. Au 1er Octobre, il a atteint 14 millions de quintaux, niveau supérieur de 30% de la moyenne du stock des cinq dernières campagnes. à noter que depuis le premier octobre, les importations réalisées ont atteint 4 millions quintaux et à cette cadence le marché sera bien approvisionné. 
     
    Infomediaire : Où en est l’accord de pêche avec l’Union Européenne ?
     
    Aziz Akhannouch : Cet accord demeure  d’actualité. Actuellement, l’accord de partenariat est toujours en vigueur et c’est son Protocole (qui fixe les possibilités de pêche, la contrepartie financière ainsi que les conditions de l’exercice de la pêche pour les navires autorisés) qui avait posé problème en 2011 quand le Parlement Européen avait rejeté sa prorogation. Il est à préciser que durant ces neufs mois d’inactivité des navires communautaires, les relations n’avaient pas été interrompues et les contacts ont été maintenus entre les deux parties, preuve en est l’échange des visites effectuées par leurs hauts responsables.
    L’Union européenne est un partenaire stratégique pour notre pays. Nous sommes pour une coopération mutuellement avantageuse et pour y parvenir, le dialogue et la concertation constructive sont privilégiés.
    Aujourd’hui, nous constatons un regain d’intérêt pour cet accord et le Maroc est toujours disposé à œuvrer pour le renforcement des relations de coopération avec le partenaire européen sur la base du principe du développement durable du secteur et celui de la préservation du patrimoine halieutique national.