Moulay Ahmed Alami, directeur du festival Jazzablanca

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    Infomediaire : Cette année les amateurs, marocains et étrangers, de jazz fêteront avec vous la 10e édition de Jazzablanca. Qu'est ce que cela représente pour vous ?

    Mly Ahmed Alami  C’est une grande joie et surtout une immense fierté. Toutes les équipes qui travaillent sur le festival sont fières de faire découvrir des artistes incroyables à des dizaines de milliers de personnes chaque année. C’est aussi la satisfaction d’avoir construit quelque chose de solide, un festival qui dure et qui grandit avec son public. Enfin, parce que j’éprouve un attachement très fort envers Casablanca, je suis heureux que le festival soit une vitrine pour la ville et ses habitants, et qu’il joue un véritable rôle d’ambassadeur au niveau régional et international.

     

    Infomediaire : Quelle est la particularité de cette 10e édition ?

    Mly Ahmed Alami  C’est l’édition de la maturité et l’occasion de dresser le bilan d’une décennie d’engagement en faveur de l’accessibilité de tous publics à des artistes et à des musiques de très haut niveau. Par exemple, cela fait quatre ans que l'hippodrome d'Anfa accueille la grande scène et le jazz club, avec l'aide et le soutien de la Sorec. Ce choix s’avère aujourd’hui payant, puisqu’il permet à des milliers de spectateurs, à chaque édition, de profiter d’un des lieux les plus emblématiques de Casablanca.

     

    La scène publique, qui existe depuis un an place des Nations Unies, marche elle aussi très fort. Elle est dédiée aux artistes marocains qui revisitent le patrimoine musical national et changera cette année de nom pour s’appeler scène BMCI, en hommage au soutien constant dont a su faire preuve la Fondation BMCI en faveur de Jazzablanca.

     

    Cette 10e édition est également celle de l'Afrique, puisque la moitié des artistes de la grande scène sont africains, à l’image des Nigérians Tony Allen et Keziah Jones ou encore du Tunisien Anouar Brahem.

     

    Infomediaire : Quels sont les enjeux majeurs auxquels le festival a fait face durant ses 10 années d'existence ?

    Mly Ahmed Alami  Le principal défi a été d'ordre financier. Les infrastructures sont rares à Casablanca et il n’est pas évident de dénicher des espaces qui respectent les normes de sécurité et d’acoustique. Les artistes coûtent aussi plus chers qu’en Europe, en raison des taxes, et les sponsors ne se bousculent pas. L’enjeu a donc été de concilier tous ces paramètres, de proposer une programmation qui soit exigeante et de parvenir à maintenir des prix accessibles au public.

     

    C’est un exercice d’équilibriste, d’autant que nous sommes une entreprise privée et que ne ne bénéficions pas des fonds du gouvernement ou de certaines entreprises publiques. La ville de Casablanca et le Conseil régional du tourisme ne nous financent pas non plus, et ce alors même que Jazzablanca fait beaucoup pour l’image de la ville. Il existe pourtant des mécanismes d’incitation pour soutenir les festivals comme Jazzablanca. Je pense à la TVA sur les spectacles, qui pourrait être de 5% au lieu des 20% actuels, ou encore aux nombreuses incitations fiscales qui peuvent accélérer les investissements dans le secteur de la culture.

     

    Infomediaire : Quelle est aujourd'hui la place du festival Jazzablanca au plan régional ?

    Mly Ahmed Alami : La dernière édition de Jazzablanca a bénéficié d’un très large engouement et cela confirme son statut de festival incontournable à Casablanca et de référence au Maroc et dans la région. De plus en plus de personnes à l’international nous sollicitent aujourd’hui, qu’ils soient marocains ou étrangers, afin de profiter du festival à Casablanca.

     

    Infomediaire : Force est de constater que vous ambitionnez de faire du festival Jazzablanca un réel tremplin pour internationaliser la production musicale marocaine. Comment se matérialise votre démarche dans ce sens ?

    Mly Ahmed Alami  Il est encore tôt pour en parler, mais c’est une idée qui fait son chemin, notamment parce que le Maroc recèle une foule d’artistes qui valent le détour. Nous réfléchissons à mettre en place, dès les prochaines éditions, des collaborations entre des artistes nationaux et étrangers, tout en développant un lieu où des musiciens puissent se produire tout au long de l'année. Dès l’an prochain, nous espérons aussi ouvrir de nouvelles scènes : une scène gratuite africaine et des petites salles qui soient en mesure de recevoir des projets plus intimistes. Les musiciens et chanteurs marocains ont souvent des difficultés à se produire à en public, en raison du manque de lieux, et Jazzablanca souhaite les aider afin qu’ils se confrontent plus fréquemment avec le public et évoluent plus rapidement vers un niveau véritablement professionnel.