Infomédiaire Afrique – Les Zama Zamas, ces galeries souterraines qui s’étendent sous une grande partie de Johannesburg, plus grande ville d’Afrique du Sud, commencent à poser de sérieuses menaces, poussant les autorités à tirer la sonnette d’alarme.

Il y a un an, Herman Mashaba, le maire de la capitale économique et financière sud-africaine, a présenté un rapport accablant détaillant les menaces de ces mines illégales pour les infrastructures vitales de la métropole, notamment ses réseaux autoroutiers et ceux des gazoducs.
Plusieurs autres sites stratégiques sont menacés dont le FNB Stadium, un bijou architectural qui a accueilli la finale de la Coupe du monde de football 2010, selon le maire.
La presse locale a révélé que ces mises en garde n’ont pas trouvé entendeur parmi les dirigeants de ce pays gouverné par l’African National Congress (ANC) depuis 1994, date de la fin du régime de la ségrégation raciale, Apartheid.
Les révélations publiées par le Sunday Times, important journal dominical, ont poussé les autorités à rompre le silence sur une question aux grandes implications pour la sécurité de ce cœur battant de l’Afrique du Sud.
Le ministère des ressources minérales a fait savoir, lundi, qu’une étude sera immédiatement réalisée pour évaluer les risques liés aux mines illégales.
Au-delà de ces risques, qui devront être clarifiés dans les semaines qui viennent, ces mines, qui comptent pour plus de 10 pc de la production annuelle d’or en Afrique du Sud, sont un foyer de souffrance pour les milliers de travailleurs, en majorité originaires de pays voisins comme le Zimbabwe, le Mozambique, la Zambie ou encore la Namibie.
De moins en moins rentables, de nombreuses mines, qui forment un véritable réseau souterrain à Johannesburg, la Cité de l’or, ont été abandonnées par les grandes compagnies comme AngloGod. Une situation qui a laissé la porte grande ouverte pour l’entrée de gangs qui exploitent les mineurs illégaux.
Selon des associations de la société civile, ces activités illégales se passent sous le regard des autorités. Ces dernières ferment souvent l’œil sur ce qui se passe dans ces zones ténébreuses, arguant que ces mines «offrent quand même des emplois à des milliers de personnes».
Selon certaines sources, l’Afrique du Sud compte près de 6.000 mines abandonnées, la majorité autour de Johannesburg.
Le Conseil sud-africain des mines avait établi que l’activité illégale dans ces mines augmentait d’une manière qui présente de nombreux défis pour le gouvernement. Les conditions de travail dans ces mines sont dangereuses, a dit le conseil, qualifiant ces galeries souterraines de «mines du désespoir».
La hausse de ses activités illégales constatée à travers le pays est imputable, selon le conseil, notamment au climat socio-économique dans le pays.
L’Afrique du Sud souffre d’un taux de chômage élevé, affectant, selon les chiffres officiels, plus de 27 pc de la population active. Selon des sources indépendantes, ce taux grimpe à environ 60 pc, en particulier parmi les jeunes dans les zones où est installée la majorité noire.
Plus de 30.000 personnes travaillent dans ces mines illégales. Ces travailleurs traversent un réseau souterrain de plusieurs kilomètres où ils vivent pendant plusieurs jours. Cette situation expose ces hommes, qui opèrent en dehors de la loi et sans aucune protection, à de graves risques.
Selon certaines estimations, entre 50 et 100 mineurs illégaux décèdent chaque année, victimes d’accidents, de racket et de violence entre gangs. Il y a quelques années, près de 200 mineurs s’étaient retrouvés coincés au fond d’une mine, après qu’un groupe rival avait scellé l’entrée du puits.
Des associations de défense des droits humains ne cessent de dénoncer l’exploitation de ces mineurs par les organisations criminelles.
La chambre sud-africaine des mines est allée même jusqu’à qualifier de «menace nationale» cette activité illégale mais très rentable pour les groupes actifs dans le domaine du crime organisé. Ces groupes tirent au moins 7 milliards de rands (1 dollar US = environ 14 rands) en recettes annuelles de l’extraction illégale du précieux métal jaune.
Il s’agit d’une activité qui opère comme «une machine bien huilée», indique Zaheera Jinnah, chercheuse au centre sur l’immigration et le travail relevant de l’université de Wits (Johannesburg).
Des syndicats, dont le syndicat national des mineurs, appellent le gouvernement à légaliser cette activité d’autant plus que le secteur emploie des milliers de personnes. Un appel auquel le gouvernement de Pretoria ne semble pas prêt à répondre positivement au moins dans la conjoncture actuelle que traverse le pays.
Rédaction Infomédiaire