Le mandat de la Banque centrale sud-africaine se trouve au cœur de la guerre sans merci que se livrent les factions belligérantes au sein du Congrès national africain (ANC, au pouvoir).

Des factions hostiles au président Cyril Ramaphosa demandent un changement du mandat de la Banque pour inclure la redynamisation la croissance économique et le marché de l’emploi au moment où le gouvernement rejette cette demande arguant que la mesure risque de déstabiliser davantage une économie fragilisée par de longues années de ralentissement.

Les analystes de la place financière de Johannesburg estiment que la demande du camp de l’ancien président Jacob Zuma s’inscrit dans le cadre d’«un agenda populiste» qui ne sert point les intérêts de l’Afrique du Sud en cette période de marasme économique profond.

Des chiffres publiés mardi par l’agence officielle des statistiques ont montré que l’économie sud-africaine a reculé de 3,2 pc au premier trimestre de 2019, marquant sa plus forte contraction depuis la crise économique et financière mondiale de 2008/2009.

Cette contraction, qui intervient suite à une croissance de 1,4 pc du Produit intérieur brut (PIB) au dernier trimestre de 2018, est le résultat de la contreperformance de secteurs clés notamment le secteur manufacturier qui a reculé de 8,8 pc.

Pratiquement tous les secteurs de l’activité économique ont enregistré des résultats négatifs, selon les conclusions de l’agence.

Cette nouvelle chute témoigne de l’aggravation de la crise économique dans le pays arc-en-ciel, qui souffre d’énormes déficits sociaux dont un chômage affectant près de 28 pc de la population active et une pauvreté touchant plus de la moitié de la population globale (environ 58 millions d’âmes).

Le ministre de Finances, Tito Mboweni, est monté mercredi au créneau pour souligner que le gouvernement n’entend pas changer le mandat de la Reserve Bank, soulignant qu’il ne comprend pas l’obsession de ceux qui appellent à une mesure qui risque de déstabiliser l’économie.

Pour sa part, le gouverneur de la Banque, Lesetja Kganyago, a souligné que le mandat de l’institution est clairement défini par la Constitution à savoir de protéger la valeur de la devise nationale, le rand, et garantir une croissance équilibré et durable.

Par ailleurs, Pule Mabe, Porte-parole de l’ANC, a indiqué que le parti s’attache aux demandes formulées par le secrétaire général de la formation, Ace Magashule, désigné parmi les premiers détracteurs du président Ramaphosa.

Ce dernier avait indiqué que le parti s’accorde au sujet de l’élargissement du mandat de la Banque centrale au-delà de la stabilisation des prix pour inclure la croissance économique et l’emploi.

L’ANC compte convoquer un conclave de hauts responsables économiques pour coordonner les efforts vers la réalisation de cet objectif, a dit le responsable.

D’autres responsables du parti de l’icône Nelson Mandela ont rejeté ces demandes.

Le débat sur le mandat de la Banque centrale a fait surface dans une conjoncture difficile pour le président Ramaphosa, qui vient d’être investi pour un nouveau mandat de cinq ans suite à la victoire de l’ANC lors des élections générales qui se sont déroulées dans le pays le 8 mai dernier.

Arrivé au pouvoir en février 2018, Ramaphosa n’a pas réussi à redynamiser l’économie, une situation qui aggrave sa vulnérabilité face à ses opposants au sein de l’ANC.

L’isolement de Ramaphosa risque de s’aggraver d’autant plus que le parti communiste, un allié clé de l’ANC, a soutenu les demandes d’Ace Magashule appelant à l’élargissement du mandat de la Reserve Bank.