Said Sekkat, président de la Commission RSE et labels au sein de la CGEM

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    Infomediaire :  Le temps est au changement; il faut s'adapter et créer de nouveaux modes de croissance dont la RSE est une partie intégrante. Quelles améliorations percevez-vous à court terme au Maroc en matière de RSE? 
     
    Said Sekkat :  L’entreprise marocaine évolue dans un contexte international de mondialisation où le marché impose de plus en plus ses règlements. La RSE constitue effectivement un levier d’adaptation au changement afin de ne pas le subir. Dans ce sens, les comportements des entreprises sont impactés par la prise en compte de la RSE dans leur gestion quotidienne tenant compte des intérêts de leurs parties prenantes autant internes qu’externes. Cette attitude implique implicitement et explicitement l’instauration d’un dialogue social et son renforcement, le respect des droits de l’Homme dans les entreprises et leur chaine d’approvisionnement, le développement socio-économique des sites d’implantation et l’ouverture à la communauté en privilégiant l’emploi local, la préservation de l’environnement et une gestion responsable des ressources naturelles et des déchets, la transparence financière et une gouvernance éthique… tous ces facteurs sont induits par la RSE et ont une conséquence positive sur l’amélioration de l’environnement des affaires dans sa globalité.
     
     
    Infomediaire :  Quels défis doivent relever les entreprises marocaines? Qu'est ce qui pousse les entreprises à se lancer dans une démarche RSE?
     
    Said Sekkat : Les défis sont dans le management du changement, de l’accompagner et de le mettre en œuvre. C’est une façon moderne d’apprécier le rôle de l’entreprise en tenant compte des parties prenantes, qui sont le fondement de la RSE. 
    Les bénéfices d’une démarche RSE sont notoirement reconnus et ce que recherchent les entreprises en s’y engageant : sérénité du climat social, implication des salariés et augmentation de leur rendement, fidélisation des clients, reconnaissance de la communauté, accroissement de la compétitivité, image positive de l’entreprise… 
     
     
    Infomediaire :  Pouvez-vous nous expliquer comment la RSE peut être un levier de performance et de croissance dans un marché en voie de développement comme le marocain?
     
    Said Sekkat : La RSE constitue un levier pour la gestion des risques (juridiques, de réputation, sociales, économiques…) et d’anticipation sur les lois à venir. Pour un pays émergeant comme le Maroc, la responsabilité sociale s’est imposée progressivement comme thème majeur de la globalisation des marchés. Elle questionne de plus en plus les conditions de la concurrence sur le marché mondial. Les conditions d’achat dans la chaine d’approvisionnement incluent les critères RSE dans le contrat des donneurs d’ordre dans une vision d’achat responsable et de valeurs partagées. Cette pratique est de plus en plus adoptée et déployée localement par les entreprises nationales socialement responsables attentives à leur chaine de valeur. C’est un atout pour la fidélisation des clients et consommateurs et la pérennisation des relations commerciales d’où la croissance et la performance durable.
     
     
    Infomediaire :  Pouvez- vous nous citer les éléments qui ont été décisifs dans la démarche de la CGEM?
     
    Said Sekkat : Notre ambition à la CGEM est que le Maroc participe à la mondialisation par le haut, en tant qu’acteur respecté parce que respectueux des normes universelles qui définissent les droits de l’Homme sur les lieux de travail comme dans la société au sens large, et qui guident les règles de protection de l’environnement ainsi que les principes qui fondent l’éthique des affaires, à commencer par la lutte contre la corruption, et qui font avancer les exigences de transparence et d’équité fiscale. C’est également le souci de la CGEM de tirer le tissu économique vers le haut et de changer l’image qu’à la société en général de l’entrepreneur associée uniquement au « profit ». Nous avons une génération de chefs d’entreprises réellement soucieux du développement social du pays et qui s’y investissent résolument. C’est pourquoi  le label RSE a été mis en place par la CGEM visant à reconnaitre les engagements de ces entreprises et à récompenser les efforts.
     
    Infomediaire :  Quel est l’objectif des Rencontres Responsabilité et Performance organisées par Déclic et la CGEM, et quel bilan tirez-vous de cette première édition ?
     
    Said Sekkat : Les Rencontres Responsabilité et Performance est le fruit d’une réflexion partagée entre Déclic et la CGEM dont l’ambition est d’adopter un nouveau concept à travers l’organisation des ateliers et des conférences sur des thématiques transversales en lien avec la RSE. L’objectif  est de rendre concret l’opérationnalisation de la RSE au sein des entreprises par la dissémination des bonnes pratiques, la discussion des difficultés éventuelles qu’elles peuvent rencontrer dans le déploiement, le suivi et l’évaluation. Il est clair que la RSE est une approche holistique qui se forge d’abord par l’implication du top management, condition indispensable pour sa réussite, et qui ensuite se partage et se renforce par tous les départements et entités de l’entreprise.
    Cette première édition a porté sur 10 thématiques et a connu un succès par le nombre de participants, la qualité des intervenants et des débats. Elle s’est ouverte également aux étudiants et le monde universitaire pour les sensibiliser au management responsable.
     
     
    Infomediaire :  Y-a-t-il de véritables spécificités sectorielles au Maroc?
    * Quid des services, industrie, agriculture
    * Les secteurs miniers sont particulièrement exposés sur le sujet. Comment est abordée la question au Maroc?
     
    Said Sekkat : Il est clair que l’approche RSE est la même, à travers l’identification des parties prenantes internes et externes et leurs attentes. Cependant, les enjeux sectoriels sont importants à relever et à intégrer dans l’approche.
    Par exemple, les spécificités sectorielles sont différentes entre le secteur de l’industrie et celui des services dans le sens où les enjeux liés à la préservation de l’environnement, la gestion des ressources naturelles, la gestion des déchets industrielles dans l’industrie tiennent une place importante dans la démarche ; par contre leur place et de moindre importance dans certains métiers des services.
    Au Maroc la question est abordée de la même manière que partout ailleurs, l’approche RSE est uniforme et ne change pas d’un pays à un autre. Ce qui diffère c’est l’apprentissage, la maturité de la démarche qui est progressive et qui se construit et se renforce dans le sens de l’amélioration continue. 
     
    Infomediaire :  Il se trouve que le Maroc, de part son paradigme économique, est un maillon des chaînes d'approvisionnement mondiales. Comment le pays peut-il contribuer à relever le défi de l'intégration des facteurs sociaux et environnementaux dans la chaîne d'approvisionnement?
     
    Said Sekkat : La prise en compte des critères sociaux et environnementaux dans la chaîne d’approvisionnement et leur intégration dans les cahiers des charges des clients est un facteur de prolifération des valeurs responsables. Cependant, il y a le souci de sensibiliser et d’accompagner les PME et TPE dans cette prise de conscience, car à défaut d’alignement elles seront éjectées du marché. D’où le rôle de la sphère d’influence qui contribue naturellement à la profusion de l’information et au changement dans les comportements.
     
     
    Infomediaire :  Le fait que l'Etat développe de l'intérêt pour le développement durable peut-il aider à faire avancer les choses ? En d'autres termes, qu'attendent les entreprises marocaines pour les aider dans leur démarche RSE ?
     
    Said Sekkat : Une vision communément partagée entre le secteur public et le secteur privé reste le meilleur moyen pour faire avancer les choses à l’avantage du développement économique et social de notre pays et la promotion des investissements. Les règles du jeu doivent être les mêmes pour les entreprises publiques et les entreprises privées et les responsabilités identiques. Toutefois, il faut admettre que le changement et la mise en œuvre demande du temps pour les entreprises dans l’appropriation des techniques et la mise en place d’où la nécessité des délais d’ajustement et des mesures d’accompagnement à travers des fonds nationaux et internationaux dédiés aux entreprises.
     
     
    Infomediaire :  Un dernier mot ?
     
    Said Sekkat : La Confédération à travers ses différentes initiatives lancées depuis 2006 pour la vulgarisation et la promotion de la RSE, notamment la charte et le label RSE, le club des entreprises labellisées, les Assises de la RSE, les Rencontres Responsabilité et Performance en partenariat avec Déclic, et les différentes rencontres régionales a été pionnière au Maroc sur la thématique de la RSE autant au niveau national que régional. Nous encourageons et soutenons toutes les initiatives qui contribuent au même dessein dans un esprit partenarial co-constructif et communautaire.