Le PLF 2024 propose d’élargir l’exonération de la TVA à tous les médicaments et matières premières entrant dans leur composition, ainsi qu’aux emballages non récupérables. Salutaire pour le citoyen, la mesure inquiète au niveau de la Fédération marocaine de l’industrie et de l’innovation pharmaceutiques (FMIIP).

C’est un pas important qui est franchi dans la poursuite de la politique d’accessibilité des citoyens aux médicaments. Jusqu’à présent, ces produits étaient soumis à une TVA de 7%. Faisant suite à l’avis A/4/20 du Conseil de la Concurrence, la note de présentation du PLF 2024, notamment les mesures spécifiques à la TVA, propose un élargissement de l’exonération de cette taxe à tous les médicaments et matières premières entrant dans leur composition ainsi qu’aux emballages non récupérables.

Actuellement, la mesure concerne les médicaments anticancéreux, les médicaments antiviraux des hépatites B et C, en plus des médicaments destinés au traitement du diabète, de l’asthme, des maladies cardiovasculaires, de la maladie du syndrome immunodéficitaire acquis (SIDA) et de la méningite. À cela s’ajoutent les vaccins, les  traitements contre l’infertilité et la sclérose en plaques, ainsi que les médicaments dont le prix fabricant hors taxe fixé par voie réglementaire dépasse 588 DH.

La rentabilité des industriels touchée

Dans le cadre de la loi portant réforme fiscale visant l’exonération des produits de base de large consommation, notamment avec la généralisation de l’AMO, il a été proposé une exonération totale de la TVA à l’importation et à l’intérieur, sans droit à déduction, pour tous les produits pharmaceutiques, les matières premières entrant dans leur composition ainsi qu’aux emballages non récupérables, et les produits et matières entrant dans leur fabrication. Une proposition qui continue de susciter un débat dans la sphère pharmaceutique bien que les industriels ne soient pas contre cette mesure en elle-même.

Selon Mohamed El Boumahdi, président de la Fédération marocaine de l’industrie et de l’innovation pharmaceutique (FMIIP), «les professionnels sont toujours d’avis avec cette question de TVA, mais cette proposition telle qu’elle a été conçue portera atteinte au volet investissement et pèsera lourd sur la rentabilité et le coût de revient des industriels en raison de sa non déductibilité», explique-t-il.

600 MDH concernés par la TVA

Sur dernier point, c’est justement la non-déductibilité de cette TVA à hauteur de 600 MDH, selon les estimations de la FMIIP, qui aura des répercussions sous forme de frein à l’investissement de la part des industriels.

«Cette proposition doit être accompagnée par un système de remboursement puisque, une fois appliquée, elle ne serait plus récupérable», ajoute El Boumahdi qui affirme que d’autres aspects liés aux licences, prestations de services, énergie électrique, machines et équipements sont assujettis à la TVA de 20%.

De l’avis de la FMIIP, «cette proposition poussera les industriels à faire appel à plus d’importation au détriment de la fabrication locale, ce qui veut dire que le Maroc perdra une partie de sa souveraineté dans ce domaine en raison du recours à l’import».

Pour sa part, Amine Bouzoubaa, secrétaire général de la Confédération nationale des syndicats des pharmaciens au Maroc (CSPM), a souligné que «la proposition telle qu’elle a été soumise demeure très vague». Pour cette question d’exonération totale de la TVA à l’importation et à l’intérieur, sans droit de déduction, il a fait allusion aux «produits pharmaceutiques» alors que la loi 17-04 portant code du médicament et de la pharmacie stipule que les produits pharmaceutiques englobent deux catégories. Il s’agit des médicaments qui sont assujettis à la TVA de 7% et les produits pharmaceutiques non médicamenteux, définis à l’article 4 de la loi 17-04 portant code du médicament et de la pharmacie, d’où l’attente de détails de cette proposition inscrites dans le cadre du PLF 2024.

Yassine Saber