La Fédération interprofessionnelle des oléagineux du Maroc (Folea) vient de publier un livre blanc, dans un contexte caractérisé par la faiblesse de la production nationale de ces variétés. Un évènement qui intervient à la veille de la signature de son nouveau contrat-programme destiné à booster le développement du secteur.
La filière des oléagineux, qui a bénéficié d’un premier contrat-programme pour la période 2013-2020, reste cependant très dépendante du marché international pour l’approvisionnement en matières premières.
Filière-clé pour la souveraineté alimentaire nationale, l’oléiculture et ses opportunités de développement ont été au centre d’un livre blanc fraîchement édité par la Fédération interprofessionnelle des oléagineux du Maroc (Folea).
Ce document d’orientation retrace l’évolution de l’amont agricole de la filière depuis le premier contrat-programme, et dresse un état des lieux complet du secteur à ce jour. Le document adresse huit recommandations proposées par la fédération, qui doit par ailleurs signer un nouveau contrat-programme en marge du SIAM 2023.
À noter que la production nationale de graines oléagineuses demeure faible et ne satisfait que partiellement les besoins nationaux en huile. Elle couvre 30.000 à 40.000 ha de surface cultivée contre 200.000 ha dans les années 90.
Selon la Folea, cette situation est la conséquence d’une politique de libéralisation du secteur, entamée en 1993, qui a poussé les agriculteurs à abandonner progressivement ces cultures. Aujourd’hui, le Maroc est donc très dépendant des importations, s’exposant ainsi à un risque de pénurie des matières oléagineuses et de flambée des cours mondiaux des matières premières sur un produit de première nécessité. Il convient de souligner qu’une baisse de la consommation des huiles de 20% a été enregistrée au Maroc ces deux dernières années. De plus, les rendements de la filière sont très fluctuants. Il restent cependant en deçà potentiel national, mais également des rendements enregistrés par les pays voisins.
Le nouveau contrat-programme de la filière vise à réduire la dépendance du secteurs aux facteurs internationaux. Pour rappel, la filière a été développée par un noyau dur d’agriculteurs ayant une bonne maîtrise de la culture des oléagineux. Les mesures phares proposées pour le futur contrat-programme portent sur l’encadrement du développement de 100.000 ha de cultures oléagineuses en bour favorable.
À l’heure actuelle, 38.000 ha seulement utilisent des semences certifiées suivant des itinéraires techniques optimisés. Il s’agit aussi d’améliorer l’attractivité de la culture pour les exploitations de petite à moyenne taille, favoriser l’utilisation des progrès apportés par le digital, ainsi l’accès à une irrigation d’appoint en intégrant les cultures oléagineuses à des périmètres irrigués avec l’octroi de droits d’accès à l’eau d’irrigation.
Il est question aussi de faciliter l’accès aux semences certifiées produites localement et d’encourager la création d’entreprises agricoles prestataires de services et distributeurs d’intrants tout en attirant de nouveaux prestataires de services pour intervenir à différents maillons de la chaîne de valeur.
Parmi les mesures phares figurent aussi la simplification de la compensation et la révision de la formule de calcul du montant compensatoire payé au Groupement des industriels oléagineux du Maroc (GIOM) pour lui permettre de garantir un prix stable à l’agriculteur.
Outre le montant compensatoire, le prix d’achat agriculteur peut être déterminé par indexation sur l’inflation et le cours international de matières premières (engrais, énergie, etc.) avec un prix plancher de l’ordre de 6000 DH/t départ champ. Quant à la subvention de collecte, elle pourrait être de l’ordre de 600 DH/t avec indexation sur l’inflation au Maroc.
Il est prévu, par ailleurs, de renforcer la subvention d’agrégation et d’en compléter le dispositif, de sorte à tenir compte des objectifs d’encadrement et de développement de l’amont et de l’aval de la filière, tout en octroyant un avantage concurrentiel à la production nationale de tourteaux et en adaptant l’assurance multirisque climatique aux spécificités de la culture oléagineuse.
Pour rappel, l’ancien contrat-programme a permis la structuration et l’organisation de la filière à travers la création de la Folea en 2013 et sa reconnaissance en 2017 en tant qu’Interprofession des oléagineux ainsi que la création du GIOM.
Ce contrat a permis de garantir le prix d’achat aux agriculteurs, fixé à 5.000 DH/t et des frais de collecte subventionnés à 50 DH/quintal. Il a également instauré une assurance multirisque climatique et facilité l’amélioration de l’accès au financement, à travers la signature d’une convention avec le Crédit Agricole portant sur le financement de matériel agricole. La finalité recherchée était l’amélioration de la productivité de la filière avec l’homologation de six variétés de colza et de tournesol ainsi que le développement d’un écosystème autour de la filière.
Actuellement, 4.000 agriculteurs agrégés cultivent régulièrement du colza et/ou du tournesol, avec une bonne maîtrise technique, avec la mise en place d’un réseau de 15 prestataires de travaux agricoles au profit des agrégés du GIOM et de 10 distributeurs partenaires pour la fourniture d’intrants. Parmi les points d’amélioration qui subsistent, la Folea souligne la révision des mécanismes de financement et d’aides qui ne sont guère adaptés.
Actuellement, le paiement compensatoire ne couvre plus l’ensemble des frais engagés par les producteurs et fait l’objet de négociations annuelles avec l’État. Les triturateurs portent donc un risque financier majeur en garantissant le prix d’achat de 5.000 DH auprès des agriculteurs. Les fournisseurs d’intrants ne sont de ce fait pas incités à investir dans la filière.
Aussi, l’État avait prévu une enveloppe de 117 MDH d’investissements pour le contrat-programme oléagineux 2013-2020. Seuls 2 MDH ont été débloqués pour la recherche & développement, alors que la loi d’agrégation agricole prévoyait des conditions d’octroi de la subvention d’agrégation non applicables à la filière oléagineuse.
Signalons qu’aucune subvention d’agrégation n’a été versée. Tout l’effort financier à ce niveau a été porté par l’agrégateur alors que les moyens prévus pour faire face aux aléas climatiques sont qualifiés de minimes. En effet, les cultures oléagineuses n’ont quasiment pas bénéficié des périmètres irrigués et des quotas d’utilisation d’eau, ce qui les a exposées aux intempéries. Les conditions climatiques sont ainsi une des raisons qui expliquent les rendements limités de la filière.
À noter enfin que la couverture Multirisque climatique, mise en place en 2014, n’a eu qu’un impact limité sur l’agriculteur car ne prenant pas en compte les spécificités des cultures oléagineuses.