La croissance économique au Maroc aurait connu une récession de 7% en 2020, suite aux effets de la pandémie du nouveau coronavirus (covid-19) et de la succession de deux campagnes agricoles sèches, indique le Haut Commissariat au Plan (HCP).


« Le Maroc, comme tous les pays du monde, aurait été impacté en 2020 par la pandémie, subissant de pénibles conséquences socio-économiques. Conjuguée à une deuxième année de sécheresse, cette crise aurait conduit à une lourde récession, la première depuis plus de deux décennies », souligne le HCP qui vient de rendre public le Budget économique prévisionnel 2021. 

Le secteur primaire aurait dégagé une valeur ajoutée (VA) en repli de 7,1% en 2020 après une baisse de 4,6% en 2019, contribuant encore une fois négativement à la croissance du produit intérieur brut de -0,9 point, fait savoir la même source, ajoutant que la campagne agricole 2019/2020 aurait été impactée, pour la deuxième année consécutive par des conditions climatiques défavorables, caractérisées par un déficit pluviométrique important et une mauvaise répartition spatio-temporelle des précipitations. Ainsi, la production céréalière n’aurait pas dépassé 32 millions de quintaux (17,7 Mqx blé tendre, 7,9 Mqx blé dur et 6,4 Mqx orge), en baisse de 39% par rapport à la campagne agricole précédente et de 57% en comparaison avec une année moyenne. Toutefois, la faible performance de la filière céréalière aurait été compensée relativement par la performance des cultures irriguées, plus particulièrement les cultures fruitières.


La production des filières animales se serait infléchie sous l’effet du déficit fourrager causé par la sècheresse, alors que l’activité avicole aurait été négativement impactée par la baisse de la demande intérieure. Ainsi, la VA agricole en 2020 se serait repliée de 8,1% en 2020 au lieu d’une baisse de 5,8% durant l’année précédente.


Les activités de la pêche maritime auraient, quant à elles, connu un ralentissement de la commercialisation des produits de la pêche côtière et artisanale accompagné par une baisse des prix. La croissance de la VA de ces activités se serait limitée à 4,4% au lieu de 8,3% l’année précédente. S’agissant du secteur secondaire, il aurait dégagé une VA en baisse de 6,3%, contribuant ainsi négativement à la croissance du PIB de -1,6 points, tandis que le secteur tertiaire aurait affiché un recul de 6,8% (-3,5 points à la croissance du PIB).


La VA touristique aurait, en effet, connu un effondrement de près de 55,8% en 2020 contre une hausse de 3,7% un an auparavant et celle du transport une chute de 25,8%. Le « Budget Economique Prévisionnel 2021 » présente une révision du budget économique exploratoire publié au mois de juillet 2020. Il s’agit d’une nouvelle estimation de la croissance de l’économie nationale en 2020 et d’une révision de ses perspectives en 2021 et leurs effets sur les équilibres macroéconomiques interne et externe.

La Banque mondiale annonce une récession de 6,3%

Le produit intérieur brut (PIB) réel du Maroc devrait se contracter de 6,3% en 2020 et le retour au niveau préalable à la pandémie du nouveau coronavirus ne serait possible qu’à partir de 2022, a affirmé, jeudi, Javier Diaz Cassou, économiste principal de la Banque mondiale (BM) au Maroc.

« Bien que l’économie marocaine montre quelques signes de reprise, la situation reste fragile étant donné la dégradation récente de la situation épidémiologique. Dans ce contexte incertain, une contraction du PIB réel de 6,3 % est prévue en 2020, tandis qu’un retour au niveau préalable à la pandémie ne devrait pas intervenir avant 2022 », a précisé M. Cassou, lors d’une table ronde dédiée à la présentation du rapport de suivi de la situation économique du Maroc – De la riposte d’urgence à la reprise.

M. Cassou a fait ressortir que la pandémie du Covid-19 a brusquement interrompu plus de deux décennies de progrès socio-économique soutenus au Maroc. « En 2020, le pays devrait subir sa première récession depuis les années 1990, et la contraction économique qui a eu lieu au deuxième trimestre, coïncidant largement avec le confinement, est la plus importante jamais enregistrée », a-t-il ajouté.

Et de souligner que c’est le résultat de la combinaison des chocs de l’offre et de la demande et des chocs externes provoqués par la pandémie, mais aussi des effets des conditions climatiques défavorables sur la production agricole. La crise a eu un impact sévère sur les emplois et les revenus des ménages, générant le pic du chômage et une détérioration des indicateurs de pauvreté et de vulnérabilité.

« Le PIB marocain a connu une chute très marquante au titre du 2ème trimestre de l’année 2020 allant jusqu’à -15%, avec une légère reprise économique au 3ème et 4ème trimestres », a-t-il dit, notant qu’entre le 3ème trimestre de 2019 et le 3ème trimestre de 2020, l’économie marocaine a perdu plus de 580.000 emplois, notamment en milieu rural.

Également, comme dans d’autres pays à travers le monde, la crise actuelle entraînera une augmentation considérable du déficit budgétaire jusqu’à 7,8%t du PIB en 2020, et la dette publique devrait dépasser 76% du PIB. Quant au déficit du compte courant, il devrait également augmenter pour atteindre 6% du PIB cette année.

Malgré la gravité de la crise, le Maroc est mieux placé que d’autres économies émergentes pour résister à cette tempête grâce à la crédibilité de son cadre macro-budgétaire, à ses tampons extérieurs relativement importants et à son accès aisé aux marchés financiers internationaux, a expliqué M. Cassou qui est également auteur de ce rapport réalisé en collaboration avec Amina Iraqi, Économiste à la BM.

Au titre de l’année 2021, plusieurs risques sont à suivre de près à savoir la marge de manœuvre de la politique économique pour faire face à une éventuelle aggravation de la crise sanitaire ou internationale, les conditions de financement extérieur qui pourraient se détériorer, les besoins de financements qui sont élevés, l’évolution des échéances en souffrance dans un contexte d’augmentation des délais de paiement, l’importante accumulation de passifs contingents liés aux programmes de garanties mis en place par le gouvernement et le besoin de pousser la croissance économique au dessus des niveaux pré-pandémiques.

Le Rapport de suivi de la situation économique du Maroc, intitulé « De la riposte d’urgence à la reprise » et qui vient d’être publié, est un rapport semestriel du Département économique de la Banque mondiale. « Ce rapport semi-annuel fait partie d’une nouvelle série que nous allons commencer à publier spécifiquement sur le Maroc », a précisé Eric Le Borgne, Chef de département macroéconomique commerce et investissement.

Présenté en présence notamment du directeur de la région Maghreb à la BM, Jesko S. Hentschel, ce rapport expose les dernières tendances de la conjoncture et les effets des politiques économiques. Ce numéro de décembre 2020 comprend un chapitre sur l’impact de la pandémie sur le secteur privé formel. Il présente les résultats d’une enquête menée auprès de plus de mille entreprises formelles avant et après le début de la pandémie, et aborde également une discussion sur des mesures qui pourraient accélérer la reprise du secteur privé.